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viernes, 21 de junio de 2013

Communiqué Marcos Moises, PRISONNIERS POLITIQUES



LES CONDISCIPLES II. Il manque les... LES PRISONNIER-E-S POLITIQUES.
SCI Moises & SCI Marcos - EZLN
vendredi 21 juin 2013.

Traduction El Viejo CSPCL


Aux adhérent-e-s à la Sexta au Mexique et dans le Monde.

Aux étudiant-e-s de la Petite école zapatiste.

Compañeras, compañeros, compañeroas,

En plus des mort-e-s dans la lutte et des disparu-e-s, ne seront pas là et y seront, nous accompagnant dans la Petite école zapatiste, les prisonnier-e-s politiques qui, par divers artifices juridiques, se trouvent dans les prisons du monde ou en situation d’asile politique.

Ils sont des milliers dans le monde entier, et la petitesse de notre parole ne parvient pas à arriver jusqu’à toutes, tous. Bien que nous ayons recours à nos compañer@s du Réseau national contre la répression et pour la solidarité, pour essayer d’atteindre le plus grand nombre possible, il en manquera toujours.

C’est pourquoi nous avons envoyé une invitation, parmi beaucoup, à quelques-uns, quelques-unes, qui symbolisent non seulement l’absurdité de prétendre enfermer la liberté, mais aussi et surtout la digne résistance et la persévérance de qui n’est pas vaincu par des gardiens, des murs et des grilles.

Parmi elles et eux se trouvent :

Alberto Patishtán Gómez.- Condamné à 60 ans de prison, ce 19 juin ce sont ses 13 ans derrière les barreaux. Son délit : être mexicain, chiapanèque, indigène, professeur et sympathisant zapatiste. Bien qu’ait été démontrée l’injustice de son emprisonnement, les autorités judiciaires retardent sa libération. D’après les mots d’un fonctionnaire gouvernemental, « si nous libérions Patishtán, ce serait un double mauvais signal : nous rendrions évident que le système judiciaire est une merde, et nous encouragerions la lutte pour la liberté d’autres prisonniers. C’est quelque chose qui ne nous convient d’aucun point de vue. Mieux vaut attendre que ceux qui font du bruit avec ça se fatiguent. » Mais ici, nous savons que oui, le système judiciaire au Mexique est bien une merde, et que celles et ceux qui luttent pour la liberté des prisonnier-e-s politiques ne vont pas se fatiguer... jamais.



Léonard Peltier.- Cela fait 37 ans qu’il est en prison. Son délit : appartenir au peuple originaire Sioux Chippewa (Anishinabe-Lakota) et lutter pour les droits des peuples originaires dans l’Union américaine. Il a été fait prisonnier en 1976 et condamné à deux perpétuités consécutives (peut-être parce que ses bourreaux voulaient s’assurer qu’il n’en sortirait ni vivant ni mort). Il a été accusé d’avoir tué deux agents du Bureau fédéral d’enquête (sigle en anglais : FBI). Les faits se sont passés à Pine Ridge, territoire sacré du peuple sioux dans le Dakota du Sud (États-Unis d’Amérique) où ont été trouvés des gisements d’uranium et de charbon.

Il a été condamné sans preuve aucune et malgré un dossier de plus de mille pages avec des évidences de son innocence. L’accusation du FBI peut se résumer ainsi : « Quelqu’un doit payer ». Il est vrai que Robert Redford a produit un film sur cette affaire, mais celui-ci n’est jamais sorti en salles aux États-Unis. Pendant ce temps, les « gars » et les « filles » du FBI, qui ont si fière allure dans les séries télé, ont assassiné 250 indigènes Lakotas. Il n’y a pas la moindre enquête sur ces crimes.

Cela dans un pays qui s’et bâti sur la spoliation des territoires appartenant aux peuples originaires dans cette partie du continent américain.



Mumia Abu Jamal.- Étasunien. Prisonnier depuis plus de 30 ans. Son délit : être journaliste et militant pour les droits des gens discriminés pour leur couleur dans l’Union américaine. Initialement condamné à la peine de mort, il subit actuellement la perpétuité. Les blancs l’ont accusé d’avoir tué un blanc, ce sont les blancs qui l’ont jugé, les blancs qui l’ont condamné, les blancs qui allaient l’exécuter, les blancs qui le surveillent.



Cela dans un pays qui s’est bâti sur l’exploitation de la sueur et du sang des esclaves amenés d’Afrique... qui, bien sûr, n’avaient pas la peau blanche.

Edward Poindexter et Mondo We Langa.- Étasuniens. Leur délit : lutter pour les droits de la population afro-américaine aux États-Unis. Victimes du Programme de contre-intelligence (sigle en anglais : CONTELPRO) du FBI, ils ont été accusés de la mort d’un policier en 1970, lors de l’explosion d’une mallette contenant de la dynamite. Bien qu’il ait l’aveu du véritable assassin, le FBI a manœuvré et semé des « preuves » contre ces deux militants de l’organisation des Panthères noires. De nombreuses preuves juridiques attestent de leur innocence à tous les deux.

Ils sont toujours en prison dans le pays qui se flatte de la probité et de l’impartialité de son système judiciaire.



Julian Paul Assange.- Originaire d’Australie et citoyen du monde. Actuellement réfugié politique. Son délit : avoir divulgué mondialement, entre autres choses, la pourriture de la politique étrangère nord-américaine.


Assange est actuellement poursuivi par les gouvernements britannique et étasunien, les deux pays supposés « paladins » de la justice et de la liberté.

Bradley Manning.- Soldat de première classe de l’armée nord-américaine. Son délit : avoir diffusé une vidéo où, depuis un hélicoptère, des soldats gringos tuent des civils en Irak. Parmi les assassins se trouvent deux journalistes. On l’accuse aussi d’avoir fait connaître des documents sur la barbarie nord-américaine en Afghanistan et en Irak. Le chef d’accusation principal contre Bradley Manning, qui pourrait lui valoir la peine de mort, est celui d’ « aider l’ennemi », c’est-à-dire d’aider à faire connaître la vérité.

Cela dans un pays soutenu par le mensonge d’une constante menace extérieure (musulmans, asiatiques, latins, etc., c’est-à-dire le monde entier) et, d’après la « manœuvre de renseignement » récemment découverte - en réalité il s’agit d’espionnage - les étasuniens aussi constituent une menace.




Antonio Guerrero Rodríguez, Fernando González Llort, Gerardo Hernández Nordelo, Ramón Labañino Salazar et René González Sehwerert.- La patrie de ces cinq personnes est Cuba, premier territoire libre en Amérique. Connus aussi comme « les cinq Cubains ». Leur délit : avoir fourni des informations sur les plans de groupes terroristes basés en territoire étasunien. En juin 1998, Cuba a remis au FBI nord-américain un rapport rassemblé par les cinq Cubains. Le rapport comprenait des centaines de pages d’information, des vidéos et enregistrements sonores sur les activités de groupes terroristes dans l’Union américaine.

Photo Rene Gonzales           

Au lieu de démanteler les cellules terroristes, le FBI arrête les cinq Cubains qui, dans les faits, avaient sauvé la vie de dizaines de personnes, principalement des touristes, qui devaient être la cible des attaques. Antonio est ingénieur, Fernando est diplomate, Gerardo est caricaturiste, Ramón est économiste et René pilote d’avion. Ils sont prisonniers pour le délit d’espionnage, sachant que lors de leur jugement, les accusateurs eux-mêmes ont attesté que le matériel qu’ils ont rassemblé n’affectait pas la sécurité nationale de l’Union américaine, et que Cuba ne représentait pas une menace.


Tout cela sur le territoire de qui dit combattre le terrorisme international.

Maria Alyokhina, Yekaterina Stanislavovna Samutsevitch et Nadejda Tolokonnikova.- Russes, membres du groupe de rock punk « Pussy Riot ». Leur délit : dénoncer l’imposition de Vladimir Poutine avec la complicité du haut clergé de l’Église orthodoxe russe. Elles ont été arrêtées et emprisonnées pour avoir joué de la musique punk dans une église. La chanson demandait à la mère de dieu de virer Poutine du gouvernement. Elles ont été condamnées à deux ans de prison pour avoir « miné l’ordre social ».

Cela dans le pays qui se flatte de s’être libéré de la « tyrannie communiste ».





Gabriel Pombo da Silva.- Anarchiste né partout et nulle part. Cela fait plus de 30 ans qu’il passe dans plus de 20 prisons différentes d’Espagne et d’Allemagne. Son délit : être conséquent. À un de ses persécuteurs il a dit : « Il n’y a rien de plus déplorable qu’un esclave satisfait... un individu dépouillé de sa mémoire et de sa dignité... il est préférable d’être conduit à l’échafaud pour rébellion que vivre cent ans de “liberté conditionnelle” et conditionnée par les peurs et les mensonges qu’on nous a vendus, inoculés... » Et, sur sa condition de prisonnier politique, il a été clair : « J’ai conscience que pour moi (comme pour beaucoup d’autres) il n’existe aucune possibilité de sortir de prison en nous appuyant sur vos lois... parce que votre légalité requiert ma renonciation à mon identité politique... Et évidemment, qui renonce à sa propre identité politique non seulement se trahit lui-même, mais trahit toutes celles qui nous ont précédés dans cette longue marche pour la dignité et la liberté. Il n’y a rien d’héroïque ni de “martyr” (de ceux-là, le cimetière est plein) dans cette considération. Je le crois sincèrement et de tout mon cœur, et c’est pourquoi je suis prêt à “payer le tribut” pour être cohérent avec moi-même et avec tout ce que je pense/ressens... »


(...)

Pourquoi je vous parle de ces prisonnier-e-s politiques si dissemblables et si distants entre eux ? Parce que pour les femmes et hommes zapatistes, la liberté n’est pas le patrimoine d’un credo, d’une idéologie, d’une position politique, d’une race. Dans les vidéos, vous verrez à quoi nous nous référons, et cela vous aidera à écouter, ce qui est le premier pas pour comprendre. Ce sont environ quinze minutes qui aident à mettre son nez dans les nombreux mondes que comprend le monde.

Comme elles et eux, des centaines de prisonnières et prisonniers politiques ont été invités à la Petite école zapatiste. À elles et eux tou-te-s nous avons envoyé une lettre comme celle que j’annexe à présent. Nous espérons qu’ils la recevront, comme les livres et les audios et les vidéos où nous racontons notre histoire. Nous espérons qu’ils accepteront l’invitation, non pas parce que nous pensons que nous avons quoi que ce soit à leur apprendre, mais pour qu’ils sachent comment, par ici, se nomme la liberté.

La voici :

ARMÉE ZAPATISTE DE LIBÉRATION NATIONALE,

MEXIQUE.

Mai 2013.

À -----------

De : Les femmes, les hommes, les enfants et les vieillards zapatistes.

Objet : Invitation spéciale pour participer à la Petite école zapatiste.

Compañer@,

Recevez le salut des petits garçons, petites filles, vieillards, femmes et hommes de l’Armée zapatiste de libération nationale.

Nous vous écrivons parce que nous voulons vous inviter tout spécialement à participer à la petite école zapatiste « La liberté selon les hommes et femmes zapatistes ».

Nous savons qu’il vous sera sans doute impossible de participer en personne à cette occasion. Mais nous savons bien aussi qu’arrivera le jour où les portes des prisons s’ouvriront pour celles et ceux qui, comme vous, ont été emprisonnés par l’injustice faite gouvernement. Et ces mêmes portes resteront ouvertes suffisamment pour que par elles entrent les banquiers et leurs serviteurs.

En attendant, nous allons chercher la meilleure manière de vous faire parvenir les documents. Ce sont des textes avec les paroles de nos compañeras et compañeros zapatistes, dans leur écrasante majorité indigènes mayas, qui y content leur propre histoire de lutte. Une histoire sûrement semblable à la vôtre, pleine de hauts et de bas perpétuels comme l’est la lutte pour la liberté, des douleurs qui l’emplissent, de l’espérance qui en déborde, et de ce côté buté permanent, comme chez vous, de ne pas transiger, ne pas se vendre, ne pas se rendre.

Peut-être qu’ils ne vont pas vous arriver tout de suite. Il est très probable que vos geôliers et bourreaux confisqueront les documents, alléguant que le paquet contient du matériel dangereux. Et c’est vrai que le seul mot de « liberté », quand elle est vécue en bas et à gauche, est l’une des nombreuses horreurs qui peuplent les cauchemars de ceux qui sont en haut au prix de la douleur des autres.

De toutes façons, ici, nous attendons, tôt ou tard, votre participation. Car si notre souci est la liberté, l’un de nos traits distinctifs est la patience.

Allez. Salut, et que la liberté soit ce qu’elle doit être, c’est-à-dire le patrimoine de l’humanité.

Au nom de tou-te-s les zapatistes de l’EZLN.

Sous-commandant insurgé Moisés Sous-commandant insurgé Marcos.

Mexique, mai 2013.

(fin de la lettre d’invitation pour les prisonnier-e-s politiques)

(...)

Bon, maintenant, vous connaissez ces autres invité-e-s à participer à la Petite école à vos côtés.

Ne les craignez pas. Ce ne sont pas eux ni elles les criminels, en revanche ce sont bien ceux qui les maintiennent prisonnier-e-s.

Allez. Salut, et que nous trouvions la liberté de la seule manière possible, c’est-à-dire avec elles toutes, eux tous.

(À suivre)

Depuis les montagnes du Sud-Est mexicain,

Sous-commandant insurgé Marcos.

Mexique, juin 2013.

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Les condisciples LES DISPARU-E-S

Juin 2013
LES CONDISCIPLES I. Premièrement les premier-e-s : LES DISPARU-E-S.
SCI Moises & SCI Marcos - EZLNvendredi 21 juin 2013.

Traduction: El Viejo CSPCL

Juin 2013.

Aux adhérent-e-s à la Sexta au Mexique et dans le Monde,

Aux étudiant-e-s de la Petite école zapatiste :

Compañeroas, compañeras, compañeros,

Comme certainement vous ne le savez pas, la première phase du premier cycle de cours « La Liberté selon les hommes et femmes zapatistes » a été mise au point.

Les matériels de soutien sont là ; les maîtresses et les maîtres sont prêts ; les inscriptions sont complètes ; les familles indigènes zapatistes qui vont vous recevoir font déjà le compte de combien de personnes leur échoient et préparent le bazar, la batterie de cuisine, arrangent les endroits où vous passerez la nuit ; les chauffeurologues, comme les appelle le Sub Moisés, règlent les moteurs et briquent les véhicules pour transporter les élèves à leurs écoles ; les insurgé-e-s tissent et détissent de l’artisanat ; les musiciens répètent leurs meilleures chansons pour égayer la fête des 10 ans, celle où seront reçu-e-s les étudiant-e-s, celle de fin des cours ; un sain climat d’hystérie collective commence à se manifester parmi celles et ceux qui participent à l’organisation ; on reprend les listes pour voir qui manque... ou qui est en trop ; et au CIDECI, siège de l’Unitierra à San Cristóbal de Las Casas (Chiapas), on avance dans les préparatifs pour la petite école et pour la chaire « Tata Juan Chávez Alonso ».

Et, comme il fallait s’y attendre, les gouvernements de l’État et de la Fédération réactivent les paramilitaires, encouragent ceux qui provoquent des confrontations, et font leur petit fourbi pour éviter que vous (et d’autres à travers vous) constatiez l’avancée dans les communautés zapatistes et le contraste marqué avec les communautés et organisations qui s’abritent sous le mince manteau de l’assistancialisme gouvernemental.

Vous voyez le genre, ce qui était à prévoir. Tant de manuels de contre-insurrection, tellement inefficaces, tellement inutiles. Tellement pareils depuis 10, 20, 500 ans. PRI, PAN, PRD, PVEM, PT, tous les partis politiques, avec d’infimes variations dans le discours, faisant la même chose... et répétant leur échec.

Qui aurait dit que les gouvernements de tout le spectre politique craindraient autant que ne s’améliore le niveau de vie des indigènes ? Et nous comprenons leur inquiétude énervée, leur panique mal dissimulée, parce que le message qui vient de ce côté-ci est clair, mais extrêmement dangereux avec son double tranchant : ils ne sont pas nécessaires... et ils gênent.

Résultat : beaucoup de mouvement, dedans et dehors, chez eux-elles et chez nous.

Et tout cela, vu depuis les plus hautes branches de ce fromager, a l’air d’un désordre ordonné (j’allais mettre « bordel », mais on me dit que celles et ceux qui généreusement nous soutiennent en traduisant dans d’autres langues se plaignent de l’abondance de « localismes » impossibles à traduire [1]). Et je pourrais ajouter que tout ça se fait « sans rythme ni raison », surtout à cause de ces cadences de ballade-corrido-ranchera-cumbia des musicos, qui sont un peu la bande-son de tout ça, et qui ont une sonorité, pour dire le moins, déconcertante.

Bref, tout marche comme sur des roulettes.

À présent, il me revient de vous entretenir de qui seront vos condisciples. Femmes, hommes et autres de tous les âges, de différents coins des cinq continents, de différentes histoires.

Et j’ai grimpé au fromager non seulement à cause de la crainte d’être assailli par un scarabée impertinent supposé chevalier errant, ou à cause des récits mélancoliques du chat-chien... bon, oui, à cause de cela aussi, mais surtout parce que, pour vous parler des premier-e-s invité-e-s, il faut se regarder le cœur, ce qui est la façon dont nous, femmes et hommes zapatistes, appelons à se souvenir, à ranimer la mémoire.

Et le fait est que les premier-e-s sur la liste des invité-e-s ont été, sont et seront celles et ceux qui nous ont précédés et accompagné sur ce chemin inachevé vers la liberté, les mort-e-s et disparu-e-s dans la lutte.

À elles toutes, à eux tous, nous envoyons une lettre d’invitation comme celle qu’à présent j’annexe ici. Nous la leur avons envoyée il y a peu de temps : hier, il y a un mois, il y a un an, 10, 20, 500 ans.

Pour comprendre cette missive non seulement il faudra regarder et écouter les vidéos qui l’accompagnent, il faut aussi une certaine dose de mémoire... et de digne rage.

Voici, donc :

ARMÉE ZAPATISTE DE LIBÉRATION NATIONALE,

MEXIQUE.

À tou-te-s les mort-e-s et disparu-e-s dans la lutte pour la liberté :

Compañera, compañero, compañeroa,

Recevez le salut de ...

Mmh...

Oui, vous avez peut-être raison. Peut-être qu’ont quelque chose à voir avec ça les paroles de Gieco, Benedetti, Heredia, Viglietti, Galeano, l’entêtement des grands-mères et des mères de la Place de Mai, le digne courage sans prix des dames de Sinaloa et Chihuahua, la douleur faite recherche obstinée des familles de milliers de disparus tout du long de ce continent. Bref, de tous ces gens si butés... et admirables.

C’est possible. Ce qui est sûr, c’est qu’en réfléchissant à qui ça pourrait intéresser de nous voir et nous entendre dans cette auto-exhibition que nous appelons « la petite école zapatiste », les premiers qui se sont présentés c’étaient vous. Toutes, tous. Parce que, bien que nous ignorions beaucoup de noms, connaître le vôtre c’est connaître ceux de vous tous, de vous toutes.

De sorte que s’il faut chercher un responsable de ces lignes, attribuez-les à la mémoire, cette impertinente perpétuelle et obstinée qui ne nous laisse pas en paix, toujours à livrer bataille, toujours à faire la guerre.

Et qu’est-ce que c’est bien, disons-nous, nous femmes et hommes indigènes, mayas, zapatistes. Qu’est-ce que c’est bien que cette guerre contre l’oubli ne cesse pas, qu’elle continue, qu’elle grandisse, qu’elle devienne mondiale !

Bon, oui, ça peut être aussi parce que par ici, nous sommes tou-te-s un peu, ou un beaucoup, comme des mort-e-s, comme des disparu-e-s, frappant encore et encore à la porte de l’histoire, réclamant une place, une petite, comme nous le sommes nous-mêmes. Demandant une mémoire.

Mais il nous semble, après avoir retourné la question dans tous les sens, que la coupable est la mémoire.

Hein ?

Bien sûr, l’oubli aussi.

Parce que c’est l’oubli qui guette, qui attaque, qui conquiert. Et c’est la mémoire qui veille, qui défend, qui résiste.

D’où cette lettre d’invitation.

Où nous l’envoyons ? Oui, ça a été un problème. Nous y avons beaucoup réfléchi, n’allez pas croire.

Oui, c’est peut-être pour cela que vous pensez que León Gieco et sa chanson « Au pays de la liberté » ont eu quelque chose à y voir.

Que c’est à cause de cela, c’est-à-dire à cause de vous, que nous avons appelé le cours « La liberté selon les hommes et femmes zapatistes » ? Pour avoir une adresse où envoyer l’invitation ? Eh bien, nous n’y avions pas pensé, mais maintenant que vous le dites... oui, c’est possible. Nous nous serions épargné ainsi tout ce micmac de chercher des adresses, des bureaux de poste, des courriers électroniques, des blogs, des pages web, des surnoms, des réseaux sociaux et toutes ces choses sur lesquelles notre ignorance est encyclopédique.

Vous savez, ici il y a eu, et il y a, pas mal de moments difficiles. Des moments où tout et tous paraissent faire obstacle. Des moments où des milliers de raisons, parfois avec l’habillage mortel du plomb et du feu, et parfois revêtues bien gentiment des commodes arguments du conformisme, nous ont attaqués sur tous les flancs pour nous convaincre des avantages de transiger, de nous vendre, de nous rendre.

Et si nous n’avons pas succombé, ce n’est pas parce que nous étions puissants et que nous avions un grand arsenal (d’armes et de dogmes à propos, ou propé, c’est selon).

C’est parce que nous étions peuplés par vous, par votre mémoire.

Vous connaissez bien notre obsession pour les calendriers et les géographies, cette façon à nous très autre de nous comprendre et de comprendre le monde.

Bon, eh bien par ici, la mémoire n’est pas une question d’éphémérides d’un jour qui ne servent que d’alibi à l’oubli pendant tout le reste de l’année. Ce n’est pas une histoire de statues, de monuments, de musées. C’est - comment puis-je le dire ? - quelque chose qui fait moins de bruit, avec moins de pompe et de circonstance. Quelque chose de plus discret, à peine un murmure... mais constant, têtu, collectif.

Parce qu’ici, une autre façon de dire ni pardon ni oubli c’est de ne pas transiger, de ne pas nous vendre, de ne pas nous rendre. C’est de résister.

Oui, c’est, disons ça comme ça, « peu orthodoxe », mais qu’est-ce qu’on y peut. Ça fait partie de nos façons... ou de nos « non, sans façons », c’est selon.

Bon, ici, nous vous attendons.

Nous envoyons la présente « au pays de la liberté », l’unique nation sans frontières mais avec tous les drapeaux... ou aucun (ce qui n’est pas la même chose, mais revient au même), et à laquelle il est le plus difficile d’arriver... peut-être parce que le seul chemin pour y arriver est la mémoire.

Nous sommes au courant de votre actuelle impossibilité d’assister à nos assemblées communautaires, et de la difficulté à vous faire parvenir les documents. Mais n’importe comment, à présent aussi bien qu’hier et demain, vous avez une place spéciale parmi nous.

...

Oui, peut-être que nous nous rencontrerons avant sans le vouloir... ou en le voulant... frappant à une porte ou apparaissant à une fenêtre, mais toujours ouvrant un cœur.

En attendant, vous, n’oubliez pas non plus que quand les femmes et les hommes zapatistes disent « nous voilà », ils vous incluent aussi.

Allez. Salut, et que la mémoire résiste, c’est-à-dire qu’elle vive. Parce qu’ils vous ont emmenés vivants, et c’est vivants que nous vous voulons.

Au nom de tou-te-s les zapatistes de l’EZLN.

Sous-commandant insurgé Moisés Sous-commandant insurgé Marcos.

Mexique, mai 2013.

(Fin de la lettre d’invitation pour les mort-e-s et disparu-e-s dans la lutte pour la liberté).

(...)

À présent, vous savez qui comptera parmi vos condisciples.

Ils marcheront par ici. Non, ils n’effraieront personne. Bon, à moins que quelqu’un craigne la mémoire et qu’il vienne à la recherche de l’oubli. Mais comme je crois que ce n’est pas votre cas, ou case, c’est selon, alors vous n’avez pas à vous en faire.

Peut-être que sans l’avoir cherché vous tomberez sur le grand fromager mère, l’arbre qui soutient le monde. Si vous avez la patience et l’imagination nécessaire, regardez son tronc et posez des questions. Peut-être que le fromager mère, avec ces disciples tellement autres comme compagnie, vous répondra dans les rides arides de son tronc. Demandez ce que vous voudrez, mais surtout demandez le plus important :

Demandez : Avec qui, tout cela ? Et il vous répondra : Avec toi.

Demandez : Pour qui, cet effort ? Et il vous dira : Pour toi.

Demandez : Qui l’a rendu possible ? Et, peut-être avec un léger tremblement, vous entendrez : Toi.

Demandez : Pour quoi ce chemin ?

Et alors le fromager mère, la terre, le vent, la pluie, le ciel saignant de lumière, tou-te-s nos mort-e-s, tou-te-s nos disparu-e-s, vous répondront :

Liberté... Liberté ! LIBERTÉ !

Ainsi, maintenant vous le savez : si, quand vous serez dans ces montagnes du sud-est mexicain, il pleut, il vente, si le ciel protège ou découvre sa lumière, et si la terre s’humidifie, ce sera parce qu’au pied du fromager mère, le soutien du monde, quelqu’un est en train de poser des questions... et surtout parce qu’il est en train de recevoir des réponses.

Qu’est-ce qui vient ensuite ? Eh bien, il me semble que cette histoire-là, ce sera à vous de la raconter.

Allez. Salut, et que la mémoire ne baisse ni ne disparaisse.

(À suivre)

Depuis un recoin de la mémoire,

SupMarcos.

Juin 2013.

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miércoles, 19 de junio de 2013

ACTOS FRENTE A LA CARCEL DE CHIAPAS A 13 AÑOS DE ENCARCELAMINETO INJUSTO

 FOTOS CEREMONIA FRENTE AL CERESO 5 EN APOYO A ALBERTO PATISHTAN

Mas de 200 personas se juntaron frente al cereso 5 para una celebracion religiosa, y lecturas de comunicado, en el marco de los 13 años de encarcelamiento injusto del preso politico Alberto Patishtan


 Plus de 200 personnes se sont réunies face a la prison de san cristobal pour une celebration religieuse et la lecture de communiqués, pour marquer les 13 ans d´emprisonnement injuste du prisonnier politique Alberto Patishtan






Despues de la comunion entre todos los presentes, se inicio una marcha al rededor de todo el cereso, gritando fuerte consignas para que los presos solidarios de la voz del amate y Alberto Patishtan les pudiera escuchar

 Apres la communion entre toutes les personnes présentes, a commencé une marche autour de la prison, ou les participants criaient des consignes pour exiger la liberté de Alberto, et pour qu´a travers les murs ces derniers puissent les entendre.






Luego compañer@s solidarios leyeron comunicados de varias organizaciones del pais para exigir la libertad del profe. Varios eventos pasaron en DF, Oaxaca, Cuernavaca....

 Ensuite des compañer@s ont lu des communiqués de nombreuses organisations du pays pour exiger la liberté d´Alberto. De nombreux évenements ont eu lieu a travers le pays.

Por fin agradecieron la presencia de tod@s, igual de varios solidarios que vinieron de España, Italia, Japon, Brasil, Francia, Guatemala, Nicaragua....

Enfin ils ont remercié la présence d´internationaux d´Espagne, Italie, Japon Brésil, France Guatemala, Nicaragua

martes, 18 de junio de 2013

Marcha contra las violencias y presiones en colonia puebla, Chenalho

Marchan tzotziles a Chenalhó para demandar justicia por despojo de terreno y ermita

"Hemos denunciado los hechos a las autoridades municipales, estatales y agrarias y ante su indiferencia cómplice el despojo se ha consumado: alambraron nuestro terreno, destruyeron nuestra cocina comunitaria, robaron láminas y material de construcción”, expusieron ante la cabecera municipal.
Hermann Bellinghausen, enviado
Publicado: 18/06/2013 17:16
San Pedro Chenalhó, Chis. Centenares de católicos de este municipio tzotzil, en su mayoría mujeres, llegaron caminando a la cabecera municipal procedentes de “las 58 ermitas de San Pedro Chenalhó”, como dijeron -esto es, de decenas de comunidades- en peregrinación y protesta por el despojo de un terreno y una ermita en la colonia Puebla: “Han pasado casi dos meses desde que el 29 de abril, un grupo de personas encabezadas por Agustín Cruz Gómez (comisariado ejidal y pastor metodista) allanaron nuestra propiedad y las autoridades no han hecho nada para impedir ese delito ni para reparar la injusticia”.
Después de ingresar a la cabecera y desfilar frente a la presidencia municipal, los indígenas se detuvieron frente a la parroquia de San Pedro y dieron lectura a una declaración dirigida, entre otros, a “los cristianos de buena voluntad de todas las iglesias”. Es significativo, pues nuevamente se esgrimen versiones de que la problemática comunitaria es por diferencias en la profesión de fe. Y nuevamente están detrás de las agresiones los grupos oficialistas que hace quince años eran paramilitares y participaron en expulsiones, agresiones y asesinatos, hasta culminar con la masacre de Acteal.
“Hemos denunciado los hechos a las autoridades municipales, estatales y agrarias y ante su indiferencia cómplice el despojo se ha consumado: alambraron nuestro terreno, destruyeron nuestra cocina comunitaria, robaron láminas y material de construcción”, expusieron conjuntamente el párroco, también tzotzil, Manuel Pérez Gómez, el consejo parroquial y el Pueblo Creyente de Chenalhó. Muy elocuente fue la presencia de la Organización de la Sociedad Civil Las Abejas.
Recordaron: “La omisión ante la violación de los derechos humanos de una persona o una comunidad es también un delito. Cuando en 1997 la violencia se fue apoderando de nuestro municipio sin que las autoridades hicieran caso de las repetidas denuncias de lo que estaba pasando, las autoridades se convirtieron en cómplices de la tragedia que culminó en la masacre de Acteal. Si sienten ahora que no tienen nada que temer porque la Suprema Corte de Justicia de la Nación protegió la impunidad de los culpables de la matanza de diciembre de 1997, les decimos que no siempre será así, porque no nos cansaremos de denunciar y de levantar nuestra voz y tarde o temprano se hará justicia”.
La movilización, que inició en la colonia Puebla y fue engrosando en su camino a la cabecera municipal hasta reunir más de 700 personas, iba voceando para las poblaciones vecinas sus quejas y exigencias, llamando a “la verdad y la tolerancia”, a la fraternidad entre los cristianos “de las distintas religiones” con sugerentes consignas ecuménicas: “Si Cristo no está muerto, entonces ¿dónde está? Cristo está en la calle gritando libertad”.
Es inevitable recordar que similares despojos o destrucciones de templos y ermitas dieron uno de los escenarios de la “guerra” de los paramilitares oficialistas en la zona Norte y en este municipio entre 1996 y 1999. Aunque la prensa local registraba hoy que “los liberados de se deslindan del clima de hostilidad en Chenalhó” (El Heraldo de Chiapas), no parece casualidad que dicha “hostilidad” se desate luego de la paulatina liberación de los paramilitares condenados por la masacre de Acteal y su igualmente paulatino retorno a sus comunidades.
Hace poco salió el único preso originario de la colonia Puebla, el ex alcalde Jacinto Arias Cruz. “Con su liberación, su grupo se siente más fuerte”, indica al reportero un miembro de Las Abejas. Igual pasa en Los Chorros con el regreso de Roberto Méndez Gutiérrez, quien se ostentaba “comandante” del grupo paramilitar que perpetró la masacre. Precisamente en Los Chorros se gesta ahora un conflicto entre dos grupos católicos, uno de ellos vinculado con los paramilitares.
“Es otra prueba de que el problema no es religioso, sólo se están fabricando confrontaciones”, comenta a La Jornada el indígena.