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miércoles, 14 de octubre de 2015

Les Peuples du Chiapas se réunissent pour construire l'Autre Justice

Déclaration commune des peuples, communautés et organisations du Forum pour construire l'autre justice



Filles, garçons, femmes et hommes, provenant des peuples ch'ol, Tojolabal, Tseltal, Tsotsil et Zoque, intégrants d'organisations sociales, nationales et internationales, nous nous rassemblons avec un seul cœur, et avec l'esprit de lutte alimenté par notre mémoire historique et le chemin de nos ancêtres qui ont lutté pour la Vraie Justice, qui ne s'achète pas, ni se vend, sinon pour une justice que nous donne la Vie et reconnaît, et respecte notre dignité.

 


Nous avons marché, et nous continuons à prendre beaucoup d'autres chemins, et nous sommes là, dans cette Terre Sacrée D'Acteal, Maison de la Mémoire et de l'Espoir de toutes et tous, de ceux qui n'oublient pas, de ceux qui cherchent la vérité, la justice et la paix. Nous sommes ici pour rassembler nos paroles pensées et consolider nos coeurs, pour marcher jusqu'à la Vraie Justice qui nous donnera une vie digne et le bon vivre comme rêve et projet de Vie de nos ancêtres, et qui aujourd'hui est notre tâche et lutte pour arriver à réaliser ce rêve. Nous sommes venus à prendre de la force avec d'autres peuples. La marche fait avec le Tribunal Permanent des Peuples nous a donné un exemple pour continuer de travailler l'organisation et la lutte pour la vérité, la non répétition et le non-oubli.




Etre à Acteal, nous rappelle nos morts, exécutés par la guerre que ceux d'en haut ne veulent pas nommer. Nous nous sommes rappelés que l'histoire est triste, qu'elle nous a traité pire que des animaux.




Et nous sommes ici à acteal, non pas pour nous résigner. Nous ne sommes pas ici pour penser si nous allons reculer. Nous ne sommes pas ici pour sortir un accord et dire que "le mauvais gouvernement est puissant et nous n'allons rien faire". Non.




Nous sommes ici à Acteal, dans le Forum pour l'Autre Justice, survivants et familles de la guerre dans la Zone Nord, de Xinich Viejo Velasco, de Banabil, du Village Primero de Agosto, ainsi avec tous ces peuples qui vivons l'impunité dans notre propre chaire, pour parler, et réaffirmer nos paroles, et la construction du Lekil Chapanel, du Bats'il meltsanel, c'est à dire la Justice Digne, la Vraie Justice, pure et humanisée. Nous sommes ici pour une justice qui prend en compte notre mémoire comme peuple.




Nos pensées et coeurs savent bien que le mauvais gouvernement ne rendra jamais la justice. La Cour Suprême de Justice de la Nation, n'a pas la dignité de pouvoir appliquer la justice, car ils servent le gouvernement, ils servent l'argent, ils servent les riches, les criminels, ils servent l'injustice, ils servent l'impunité, ils ont prostitué la justice. Les gouvernements ne gouvernent plus, ils enferment, tuent, torturent, disparaissent, déplacent à ceux qui construisons l'autonomie comme alternative de vie au système de mort. Les lois que construit l'état vont contre le peuple. Le système de justice au Mexique est pourri.




Tellement d'impunité, de mensonge, de cynisme et hypocrisie de la part du mauvais gouvernement ont fait que nos yeux se sont ouvert, que nos oreilles ont écouté les cris de douleur par l'injustice, et ainsi, notre cœur, et pensée nous ont dit que la Vraie Justice, digne, durable, humaine et juste, ne sera pas donnée par le mauvais gouvernement ni ses juges corrompus, et encore moins la si mal nommée Cour Suprême de Justice de la Nation, qui maintenant s'est convertie dans la plus grande maison de l'impunité et du mensonge. La Vraie Justice viendra de ceux qui construisons, depuis le bas.




C'est pour cela que les peuples réaffirment que nous sommes organisés, que nous continuerons à construire nos propres lois. Nous affirmons que les accords de San Andrés Sakamch'en des Pauvres font parti de nos instruments pour une Vraie Justice. Nous voulons compter avec les femmes et hommes qui savent régler nos problèmes, qu'ils soient dignes et non corrompus, savantes et savant, qu'ils guident avec un bon coeur, avec une conscience propre et avec un compromis pour la Vérité comme les juges du Tribunal Permanent des Peuples. Qu'ils nous respectent comme peuples et sachent respecter la vie.




Pour cela, nous reconnaissons que nous avons besoin de lutter ensemble, qu'importent les différences culturelles, âges, professions, travaux et religions, c'est seulement en marchant ensemble que nous y arriveront. L'Autre Justice qui est pour les femmes, hommes, filles, garçons, étudiants, travailleurs des champs et de la ville, migrants, lesbiennes, homosexuels, transgenre, c'est à dire toute personne humiliée, discriminée, ou opprimée et réprimée injustement par le système capitaliste néolibéral.




Dans nos villages, nous voulons que reviennent l'harmonie et la paix qui s'est perdue à cause de l'injustice et la guerre nous voulons construire la justice comme une maison, depuis nos vrais coeurs.




Comme femmes, nous voulons continuer à garder la vie et la mémoire, apprendre à nos filles et à nos fils pour qu'ils sachent ce qu'il s'est passé. Continuer à mettre nos forces de femmes ensemble avec les hommes. Comme jeunes, comme fils et filles, nous avons appris à marcher et à prendre conscience de lutter pour défendre notre dignité comme femmes et peuples.




Comme peuples qui avons vécu l'injustice perpétrée par l'Etat mexicain et ses opérateurs depuis les différents niveaux, nous convoquons à la conscience de ceux qui nous ont accompagné dans leur lutte pour que dans n'importe quel endroit de la planète terre, dans n'importe coin où ils sont confortablement cachés, ils soient signalés à travers de n'importe quel moyen, car ici nous n'oublions pas, et nous nommons les assassins crimenls des peuples: Carlos Salinas de Gortari, Ernesto Zedillo Ponce de León, Vicente Fox Quezada, Felipe de Jesús Calderón Hinojosa, Enrique Peña Nieto, presidentes de México; Emilio Chaufett ExMinistre du gouvernemento, Gral. Enrique Cervantes Aguirre, ex-ministre de la Defense Nationale, Gral. Mario Renán Castillo, Commandant de la 7ma. Région Militaire, Gral. Salvador Cienfuegos Zepeda actual Ministre de la Defensé Nationale, Julio Cesar Ruiz Ferro, Roberto Albores Guillen, Pablo Salazar Mediguchía, Juan Sabines Guerrero, exgouverneurs du Chiapas, y Manuel Velasco Coello, actuel gouverneur du Chiapas, et nous rejettons les actes répressifs du chef de gouvernement du District Fédéral et entre autres personnes, ceux qui ont blessé le Peuple et sont responsables directs et intellectuels des crimes de lèse majesté.





Nous savons bien que la guerre que nous vivons est pour nous déplacer, nous quitter la vie comme personne et comme peuples, et nous expulser de la terre mère. C'est pour cela que nous disons, nous allons continuer à nous rassembler comme communautés, peuples, organisations pour la défendre, car ici, la terre mère est notre vie c'est pour cela que la justice que nous exigeons, l'Autre Justice, que nous sommes en train de construire c'est pour la Terre Mère et nous voulons qu'elle soit reconnu et qu'on respecte ses droits.




Nous voulons vous dire aux autres soeurs et frères qui souffrent et luttent pour une Vraie Justice que la douleur de leur coeur est aussi la douleur de notre coeur. Et nous leurs disons que de la douleur naît la lumière qui illuminé l'espoir, et nous donne la force et l'horizon pour construire l'Autre Justice. Et nous exigeons la présentation en vie des 43 étudiants disparus d'Ayotzinapa et nous exigeons la Justice pour le Cas Narvarte.




Pour cela, nous vous invitons où que vous soyez, où que vous viviez, où que vous rêviez et travailliez, que vous luttiez aussi, que vous construisez aussi cette Digne Justice, humaine, durable et juste. La Vraie Justice, el Lekil Chapanel et Bats'il Tusanel.




Depuis la Terre Sacrée Des Martyrs d'Acteal, Maison de la Mémoire et de l'Espoir.




Organisation Xi'nich

Peuples Unis Pour la Défense de l'Energie Electrique PUDEE

Peuple Croyant de Simojovel

Déplacés forcés du Village de Primero de Agosto

Déplacés Forcés de Banabil

Centre des Droits de l'homme FrayBartolomé de Las Casas AC

Organisation de la Société Civile de Las Abejas de Acteal

Collectif Koman Ilel (Vision collective)

Radio El Grito, Argentine












martes, 13 de octubre de 2015

Frente a las amenazas, la ZAD se extiende...




Ocupantes de la ZAD de Notre Dame des landes, decidieron, ese sábado 10 de octubre, ocupar una nueva zona, la Noe-Verte, para construir una nueva casa y un proyecto de fabrica de conservas autogestionada.





La policía llegó y amenazó con despojarlos en la tarde, para impedir la instalación y aniquilar el proyecto. Alrededor de 20 de policías se instalaron en la ruta, al sur de la nueva casa, y controlaron los vehículos entrantes. Helicópteros sobrevolaron la zona. 4 Camiones de policía fueron señalados en el lugar y otros vehículos fueron vista en los alrededores. A las 5pm un agente judicial pasó para constatar la ocupa.


En Francia, el gobierno declaro ya no querer esperar más los amparos en contra de la construcción del megaproyecto del aeropuerto,manifestando así su voluntad de romper los acuerdos que había tomado en 2012 y 2014. Pretende desalojar la ZAD para empezar las obras del aeropuerto. Una nueva operación policíaca podría, aparentemente, acaecer al principio del año 2016, apocas semanas de la COP21, conferencia internacional sobre el clima, culminando así la hipocresía del gobierno "socialista".

lunes, 12 de octubre de 2015

la CIDH aprueba la medidas cautelares solicitada para el Pueblo Creyente de Simojovel




El 8 de diciembre del 2014 el Pueblo Creyente de Simojovel junto con Frayba solicitó a la CIDH medidas cautelares, para poder continuar su lucha pacífica en contra de la violencia y corrupción institucionalizada aun en medio de amenazas y hostigamientos en contra de sus vidas.



"Tras analizar las alegaciones de hecho y de derecho presentadas por ambas partes, la Comision considera que la informacion presentada demuestra, prima facie, que Marcelo Pérez y los démas integrantes del pueblo creyente de Simojovel, se encuentran en una situacion de gravedad y urgencia, puesto que sus vidas e integridad personal se encontrarian en una situacion de riesgo."

En consecuencia de acuerdo con el articulo 25 del Reglamento de la CIDH, la Comision solicita a México que:

a/ Adopte las medidas necesarias para garantizar la vida y la integridad personal de Marcelo Pérez Pérez y los demas integrantes del pueblo creyente.

b/ Adopte las medidas necesarias para garantizar que los beneficiarios puedan desarollar sus actividades como defensores de derechos humanos sin ser objeto de actos de violencia y hostigamiento por el ejercicio de sus funciones

c/ Concierte las medidas a adoptarse con los beneficiarios y sus representantes




d/ Informe sobre las acciones adoptadas a fin de investigar los presuntos hechos que dieron lugar a la adopcion de la presente medida cautelar y asi evitar su repeticion."


La comision insistio tambien, para que el Gobierno de Mexico tenga bien informa a la CIDH "dentro de un plazo de 20 dias sobre la adopcion de las medidas cautelares acordadas y actualizar dicha informacion en forma periodica."


Pueden descargar aqui resolucion del CIDHhttp://www.oas.org/es/cidh/decisiones/pdf/2015/MC506-14-ES.pdf


 

Pronunciamiento conjunto del Foro Caminando La Otra Justicia


Pronunciamiento conjunto de pueblos, comunidades y organizaciones del Foro Caminando La Otra Justicia
Fotos: Area de Comunicacion de Las Abejas
Articulo: Las Abejas

11 de octubre del 2015

 


Niñas, niños, mujeres y hombres provenientes de los pueblos Ch'ol, Tojolabal, Tseltal, Tsotsil y Zoque, integrantes de organizaciones sociales tanto nacionales como internacionales, nos juntamos en un solo corazón y con el espíritu de lucha alimentado por nuestra memoria histórica y caminar de nuestras abuelas y abuelos que lucharon por la Justicia Verdadera, justicia que no se compra ni se vende, sino la justicia que nos da Vida y que reconoce y respeta nuestra dignidad.


Hemos caminado y seguimos recorriendo muchos y otros caminos y estamos quí, en esta Tierra Sagrada de Acteal, Casa de la Memoria y la Esperanza de todas y todos de quienes no olvidamos, de quienes buscamos verdad, justicia y paz. Estamos aquí para juntar nuestras palabras, pensamientos y fortalecer nuestros corazones, para caminar hacia la Justicia Verdadera que nos traerá una vida digna y buen vivir como sueño y proyecto de Vida de nuestras abuelas y abuelos y que hoy es nuestra tarea y lucha conseguir ese sueño. Venimos a tomar fuerza con otros pueblos. El caminar con el Tribunal Permanente de los Pueblos nos dió ejemplo para seguir trabajando la organizacion y la lucha por la verdad, la no repeticion, y el no olvido.




Estar en Acteal nos recuerda nuestros muertos, ejecutados por la guerra que los de arriba no quieren nombrar. Hemos recordado que es triste la historia, que nos han tratado peor que a animales.


Y estamos aquí en Acteal, no para resignarnos. No estamos aquí para pensar si vamos a echarnos para atrás. No Estamos aquí para sacar un acuerdo y decir que "el mal gobierno es poderoso y no vamos a poder hacer nada". No.

domingo, 11 de octubre de 2015

Sipaz: Le genre dans la migration: "les femmes qui migrent, qui restent, qui cherchent leur proche et qui aident

DOSSIER : Le genre dans la migration - les femmes qui migrent, les femmes qui restent, celles qui cherchent leurs proches et celles qui apportent leur aide



La migration internationale est un phénomène en nette augmentation. Année après année, des centaines de milliers de personnes tentent d'atteindre les États-Unis à la recherche d'un emploi, d'une source de revenus et d'une certaine sécurité leur assurant une meilleure qualité de vie. Parmi les personnes qui traversent le Mexique, on trouve autant des nationaux que des migrant-e-s d'autres pays, principalement d'Amérique Centrale, et dans leur grande majorité sans papiers. Comme l'évoquait notre dossier la migration centroaméricaine aux États-Unis - reconnaître le réfugié sur la "route de l'enfer" (Bulletin de SIPAZ de septembre 2014), le voyage à travers le Mexique est difficile et dangereux. Nous tentons ici de détailler en quoi les impacts sont différents pour les femmes par rapport aux hommes.

Celles qui restent
© Voces mesoamericanas
© Voces mesoamericanas
Au Chiapas, la migration a augmenté après 1994, année charnière de l'entrée en vigueur de l'Accord de Libre Échange d'Amérique du Nord (ALENA). Ce traité consiste en la mise en place d'une série de mesures d'ajustement économique néolibérales, qui a eu pour conséquence l'augmentation de la pauvreté au sein d'une population majoritairement paysanne. C'est justement pour assurer la subsistance de la famille et une certaine sécurité matérielle – en acquérant des terres ou un logement - que la migration, principalement vers les grandes villes du Mexique et les États-Unis, a augmenté. La migration marque la vie des femmes, qu'elles émigrent ou qu'elles restent seules dans leur communauté après le départ de leur conjoint. Lors d'un entretien, l'association civile Voces Mesoamericanas qui travaille avec les migrants, nous a fait part de ses observations quant aux changements.
De plus en plus de femmes deviennent chef de famille quand leur conjoint émigre vers une autre région ou aux États-Unis. Sans eux, les femmes doivent assurer à la fois les travaux domestiques et le travail à l'extérieur. Elles ont la charge des enfants, des tâches domestiques et doivent cultiver la terre. Avec l'argent envoyé par leur mari, certaines emploient des travailleurs journaliers qui s'occupent de leurs terres, ouvrent de petites épiceries, ou l'utilisent comme revenu supplémentaire. Quoi qu'il en soit, la charge de travail, y compris domestique, augmente.
Un autre aspect du problème réside dans le fait que beaucoup de femmes restent sous le contrôle de leur beau-père ou de leurs beaux-frères. Ils ne les laissent pas seules : elles sont surveillées et accompagnées quand elles sortent, avec les conséquences émotionnelles qu'une telle surveillance occasionne. Elles n'ont pas la possibilité de discuter avec d'autres femmes pour partager tristesse ou peine, ce qui rend plus difficile l'élaboration du deuil que la séparation implique. Elles sont souvent en contact téléphonique avec le compagnon qui a émigré, bien que cette communication soit fragilisée lorsque l'époux consomme alcool ou drogue, ou s'il a fondé une autre famille dans son nouveau lieu de vie. Dans ces cas-là, l'argent envoyé diminue en même temps que la fréquence des contacts – parfois jusqu'à l'arrêt total.
Dans les états de Guerrero et Oaxaca, beaucoup des femmes des communautés qui se sont retrouvées chefs de famille ont dû assumer les fonctions et tâches de leurs maris pour maintenir les structures communautaires. La migration masculine a ainsi favorisé la participation des femmes dans des espaces traditionnellement réservés aux hommes. Dans les Hauts Plateaux du Chiapas toutefois, on ne laisse pas les femmes assumer des fonctions masculines ; les communautés ont choisi un système d'amendes afin de freiner la migration, forçant ainsi les hommes à rester ou à rentrer chez eux pour accomplir leurs devoirs communautaires. Les amendes augmentent en fonction de l'importance du poste et, en cas de non paiement, la famille court le risque de ne plus être considérée comme membres à part entière de la communauté. Certains hommes choisissent de ne pas revenir et de perdre leurs droits ; ils sont alors bannis de la communauté, et leurs femmes et leurs enfants peuvent être expulsés. Les femmes chefs de famille restées sans terre vont en général se réinstaller dans leur famille, habituellement chez leur mère. Le transfert des amendes des hommes à leurs femmes met ces dernières en situation de vulnérabilité accrue.

Celles qui émigrent

Doña Juana con las flores © Voces mesoamericanas
Doña Juana (migrante aux États-Unis) et ses fleurs
© Voces mesoamericanas
En général, les femmes chiapanèques qui émigrent ont l'occasion de vivre des choses différentes de la routine de leur communauté. Beaucoup d'entre elles partent seules, sans suivre leur conjoint, d'autres émigrent sur les conseils d'un frère, de leur père ou d'un ami. Certaines migrent avec leurs enfants, les autres souffrent d'avoir dû les laisser à leur famille. Selon Voces Mesoamericanas, de nombreuses femmes ayant émigré racontent avec fierté que ce départ leur a permis d'échapper au contrôle de la communauté et à la violence qu'elles subissaient au sein de la famille. Il est en effet toujours courant, quand le père boit, que les femmes de la famille soient maltraitées ; ce sont en général les mères, moins souvent les enfants. Même si elles finissent en général par travailler dans un endroit où elles sont exploitées, les femmes jouissent de plus d'autonomie et peuvent choisir plus librement leur vie en disposant de leurs propres revenus. Certaines, à leur retour dans la communauté, peuvent acheter un terrain ou lancer un petit commerce. La migration est ainsi perçue comme une fuite possible et choisie, un acte de rébellion et de désobéissance. La possibilité de migrer est de fait présente dans l'imaginaire des jeunes, garçons et filles : pour elles, elle représente une échappatoire ; pour eux, la migration symbolise aujourd'hui un rite de passage, une épreuve d'intégration au groupe des adultes et des hommes capables de pourvoir aux besoins de la famille. Plus loin et plus longtemps ils partent, et plus ils bénéficient de la reconnaissance de la famille.
Après avoir vécu la migration, de nombreuses femmes voient leurs relations avec les hommes ou leur rôle au sein de la famille changer. Ayant acquis plus d'autonomie, leur apport au sein du foyer a plus de poids. Signalons également que la protection juridique en vigueur dans les régions qu'elles ont découvertes (par exemple les politiques contre les violences à l'égard des femmes), leur font appréhender d'une autre manière les relations.
Il faut attirer l'attention sur le cas particulier des femmes qui émigrent seules et souhaitent retourner ensuite dans leur communauté dans les Hauts Plateaux du Chiapas. Elles sont souvent rejetées, ce qui ne les incite pas à revenir ; elles choisissent en conséquence de s'installer dans une ville voisine ou dans les quartiers périphériques de San Cristóbal de Las Casas. En effet, les rumeurs les accusant d'avoir eu des relations avec d'autres hommes pendant leur absence entraînent leur exclusion et leur stigmatisation.

La migration en provenance d'Amérique Centrale vers les États-Unis

A la escuela © Voces mesoamericanas
A l'école – enfants de migrants aux États-Unis © Voces mesoamericanas
Même s'il est difficile d'obtenir des données fiables sur le passage des migrants dans le pays, Amnesty International affirme que des groupes issus du crime organisé attaquent, volent, escroquent, violent, kidnappent et assassinent quotidiennement les migrant-e-s d'Amérique Centrale sur leur parcours vers les États-Unis. Selon le WOLA (sigle anglais désignant le bureau de Washington sur l'Amérique Latine), quelques 20 000 migrants et migrantes sont enlevés chaque année. D'après le Rapporteur spécial sur la migration de la Commission Interaméricaine des Droits de l'Homme, la tragédie vécue par les personnes sans papiers traversant le Mexique "est tout aussi importante que celle d'Ayotzinapa". Face à cette situation, le gouvernement mexicain a mis en place en juillet 2014 le Plan Frontière Sud. S'il s'agit en apparence de garantir la sécurité des migrants, cette politique vise dans la pratique à tenter d'enrayer le flux migratoire vers les États-Unis. Ce programme, en rendant plus difficile la traversée du Mexique, oblige les migrants - hommes et femmes - à chercher des routes alternatives, souvent plus dangereuses, et les expose ainsi davantage aux dangers liés au crime organisé - cette vulnérabilité étant encore accrue pour les femmes.

Les violences sexuelles subies par les migrantes

Les femmes migrantes d'Amérique Centrale subissent une grande violence dans leur pays. Elles sont encore davantage vulnérables en traversant un pays aux normes socio-culturelles discriminatoires pour les femmes. Dans leur cas, à cette condition de femmes s'ajoute le fait d'être migrantes et sans papiers, et elles font ainsi systématiquement l'objet de violences. Elles sont victimes, entre autres, de prostitution forcée, de traite des personnes –pour être exploitées sexuellement et/ou dans le travail – de viols et d'abus sexuels, de violence physique, sexuelle ou psychologique de la part de leur conjoint, de leurs proches, de compagnons, de guides ou des autorités. Selon un rapport d'Amnesty International datant de 2010, au moins 6 migrantes sur 10, femmes ou filles, subissent des violences sexuelles pendant le voyage.
En el lago © Voces mesoamericanas
Au lac © Voces mesoamericanas
Cette violence peut avoir des conséquences graves : exposition et contamination par des infections sexuellement transmissibles (dont le VIH/Sida) ; grossesses non désirées ; avortements forcés ; absence de prise en charge médicale périnatale. Selon le rapport de 2012 "Aider au Mexique les femmes migrantes victimes de violence sexuelle" écrit par l'organisation civile Sin Fronteras (« Sans frontières »), « [l]es femmes qui voyagent dans des zones isolées ou sur le train courent un risque accru d'être victimes de violence sexuelle, que ce soit par le crime organisé, par des délinquants, d'autres migrants, ou même les autorités judiciaires ou migratoires corrompues. La violence sexuelle fait partie de la terreur subie par les migrantes et leurs familles, et elle fait apparemment partie du prix à payer par les migrantes pour arriver à destination. La violence sexuelle représente une telle menace pendant le voyage, que les trafiquants obligent souvent les femmes à s'injecter une substance contraceptive avant le voyage, en précaution contre des grossesses qui pourraient résulter de viols ».
Le rapport de Sin Fronteras affirme en outre que « les violences sexuelles sont un problème social banalisé, qui s'accentue à cause d'une réponse gouvernementale défaillante en terme de prévention, de protection et de prise en compte des Droits. [...] En ce qui concerne les femmes qui décident de porte plainte, des problèmes se posent durant l'enquête, dans le traitement et la sanction des affaires de violence sexuelle. Les mécanismes d'investigation, de prise en charge et de prévention pourtant mis en place par le Mexique dans les processus de plaintes, ne s'appliquent pas aux femmes en transit. Les normes discriminatoires envers les femmes les humilient, et les obligent à fournir des preuves pour que soit menée une enquête. A cela s'ajoute l'absence de mécanismes de protection des victimes, ce qui entrave le dépôt de plainte ». Au final, beaucoup de femmes migrantes, faute de détenir des papiers ou par peur d'être renvoyées dans leur pays, décident de ne pas dénoncer la violence subie.

Celles qui cherchent leurs proches

La mamá en el invernadero. Todas hablan Tsotsil © Voces mesoamericanas
Tous parlent tsotsil
© Voces mesoamericanas
Les femmes jouent également un rôle primordial dans la recherche de leurs proches ayant disparu pendant la traversée vers les États-Unis. En décembre dernier, la dixième caravane des mères d'Amérique Centrale "Puentes de Esperanza" (Ponts d'espoir) a été organisée. Des mères en provenance du Guatemala, du Honduras, du Salvador et du Nicaragua ont suivi un parcours qui a traversé 10 états du Mexique. La caravane a permis de réunir trois de ses membres et leurs proches perdus de vue : une femme a retrouvé son frère après 17 ans, et deux mères ont retrouvé la trace de leurs enfants, après respectivement 15 et 10 ans sans nouvelles. Même si le gouvernement mexicain ne comptabilise officiellement que 157 personnes étrangères enregistrées comme disparues, les associations civiles estiment à au moins 70 000 le nombre de migrants et migrantes disparus au Mexique.

Celles qui tendent la main

Les autorités n'apportant aucun soutien aux migrants d'Amérique Centrale, un groupe de femmes s'est constitué dans la communauté Guadalupe, La Patrona (état de Veracruz), afin de les aider pendant leur trajet. Après la disparition des trains de passagers (l'équivalent mexicain de la SNCF ayant été privatisé), les migrant-e-s ont cherché des alternatives pour traverser le Mexique. Ils ont ainsi commencé à monter sur le toit des trains de marchandise, aujourd'hui appelés "La Bestia" (la Bête). Le 14 février 1995, des femmes sortant d'un magasin avec leurs achats ont répondu à la demande d'aide des migrants du train, en leur lançant leurs sacs de provisions. C'est ainsi qu'est né le groupe de militantes "Las Patronas". « Je me consacrais à ma maison, à mon foyer, au travail des champs, rien de plus, je ne savais pas que je pouvais aider », raconte la fondatrice Norma Romero. Les femmes ont cependant senti la nécessité d'agir face à la misère à laquelle elles assistaient. Aujourd'hui, elles préparent chaque jour 20 kilos de haricots et de riz, et les remettent aux migrants qui, juchés sur le toit de "La Bestia", passent par leur communauté pendant leur trajet vers le nord.
Regresando a la Comunidad © Voces mesoamericanas
De retour à la communauté
© Voces mesoamericanas
A l'occasion de leurs 20 ans de travail, des personnalités comme Raúl Vera López, évêque du diocèse de Saltillo, Alejandro Solalinde, de l'auberge "Hermanos en el camino" (« Frères sur le chemin »), à Oaxaca, ou Fray Tomás González, de l'auberge "La 72" à Tenosique, Tabasco étaient présentes. Le Plan Frontière Sud a été vivement critiqué lors de l'évènement, et qualifié de tentative de « nettoyage ethnique », les mesures appliquées niant les Droits des migrant-e-s et aggravant leurs conditions de voyage. Raúl Vera López a déclaré « les femmes de la communauté La Patrona vont à l'encontre de l'égoïsme, de l'arrogance et de l'avidité des politiques et des gouvernants, qui nous ont amenés au chaos dans lequel les gens doivent se débattre pour survivre ».
Tous ces destins de femmes touchées par la migration montrent un but commun : la recherche d'une vie meilleure. Que ce soit les femmes qui restent et doivent affronter les difficultés économiques et les pressions sociales. Que ce soit les femmes qui décident de quitter leurs terres pour une vie plus libre et émancipée dans une région inconnue. Le voyage qu'elles entreprennent est dur et dangereux, particulièrement pour les femmes migrantes, c'est pourquoi il est important qu'elles trouvent de l'aide sur leur route. En ce sens, l'activisme des "Patronas" est un combat exemplaire et indépendant face au manque de résultats des politiques migratoires qui misent sur le contrôle du flux migratoire. Malgré tous les risques encourus, leur envie de changement est plus forte que la peur, comme en témoigne une migrante : « Nous avons décidé de partir pour réussir quelque chose dans la vie, et pour donner à nos enfants une vie meilleure ».