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domingo, 22 de mayo de 2016

La violence et les violations des Droits de l‘Homme au Mexique, sources d’inquiétude internationale

“La gravité de la situation actuelle des Droits de l’Homme au Mexique fait l’objet d’un large consensus,
que ce soit au niveau national, régional ou international”
Zeid Ra’ad Al Hussein, Haut-Commissaire des Nations Unies aux Droits de l'Homme

Un an depuis le début de l'affaire Ayotzinapa, activités à San Cristóbal de Las Casas, Chiapas © SIPAZ
Un an depuis le début de l’affaire Ayotzinapa, activités à San Cristóbal de Las Casas, Chiapas © SIPAZ
@Sipaz
La diplomatie mexicaine avait fortement critiqué le rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture de mars 2015, qui spécifiait que la torture et l’impunité sont des pratiques généralisées au Mexique. Le second semestre 2015 a également vu son lot de rapports et déclarations critiques émises par différentes hautes instances sur la situation des Droits de l’Homme dans le pays.
En octobre, la Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH) a rendu les conclusions de sa visite sur place, et constaté “[l]a grave crise en matière de Droits de l’Homme au Mexique, caractérisée par une situation extrême d’insécurité et de violence”. Le sous-secrétaire aux Droits de l’Homme du Ministère de l’Intérieur, Roberto Campa Cifrián, considère pourtant que ce rapport “[n]e reflète pas la réalité du pays” puisqu’il se base sur des “rencontres et des entretiens” réalisés “dans seulement 6 des 32 états qui forme le pays (…) et en cinq jours”. Les ONG ont condamné cette réaction dénigrant les organismes internationaux qui travaillent à documenter la réalité du pays.
Peu après, à l’occasion de sa visite dans le pays, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, a dit l’urgence de combattre l’impunité face à “la gravité de la situation actuelle des Droits de l’Homme au Mexique”. Face à l’intolérance du gouvernement aux critiques internationales, il a conseillé d’“écouter le message au lieu de vouloir tuer le messager”.
En octobre également, et pour la première fois depuis le début de l’Initiative Mérida (financement des Etats-Unis destiné au Mexique pour combattre le crime organisé) en 2008, le Département d’Etat a réduit de 5 millions de dollars l’aide de 148 millions initialement prévue, décision applaudie par les organisations de Droits de l‘Homme tant aux Etats-Unis qu’au Mexique.
Un autre motif de satisfaction en la matière a été la prorogation de 6 mois de la présence du Groupe Interdisciplinaire d’Experts Indépendants (GIEI). Cette décision a été prise par le gouvernement mexicain et la CIDH, lors de la 156ème session de cette dernière. Le GIEI a été créé pour enquêter sur la disparition de 43 étudiants de l’Ecole Normale Rurale d’Ayotzinapa (institut de formation des enseignants situé à Iguala dans l’état du Guerrero) en septembre 2014. La décision de prolonger son mandat paraît marquer un tournant dans l’attitude du gouvernement mexicain. Elle va en effet dans le sens du premier rapport du GIEI, rendu public au Mexique en septembre, et que plusieurs hauts fonctionnaires avaient tenté de discréditer les semaines suivantes.

Ayotzinapa : la “vérité historique” sévèrement remise en question

Manifestation en faveur d'Ayotzinapa dans la ville de Mexico, août 2015 © SIPAZ
Manifestation en faveur d’Ayotzinapa dans la ville de Mexico, août 2015 © SIPAZ
Le rapport du GIEI rend compte de 180 victimes directes, dont 6 cas d’exécutions extrajudiciaires et 43 “disparitions”. Il affirme “la présence de différents agents de l’Etat (police municipale, fédérale ministérielle) et [ne pas avoir] rencontré d’indices que ces derniers aient exercé leur fonction de protection”. Il a signalé un mauvais traitement des preuves et remis en question  la “vérité historique” présentée par Jesús Murillo Karam, Procureur alors en fonction, qui avait nié l’implication ou la présence de la Police fédérale et de l‘Armée dans les événements. Un fait nouveau rapporté dans le document est que cinq autobus, et non quatre, ont été ce jour-là utilisés par les étudiants – fait qui avait été dans un premier temps réfuté  par les autorités. Face à des preuves vidéos, ces dernières ont présenté un véhicule différent. Le GIEI soupçonne le cinquième bus d’avoir été maquillé pour transporter de la drogue –il aurait été utilisé par les étudiants en méconnaissance de cause. Cette hypothèse ouvre de nouvelles pistes d’investigation.
Dans un premier temps, certains fonctionnaires ont tenté de discréditer ce rapport par des rumeurs de conflits d’intérêt concernant le secrétaire de la CIDH, Emilio Álvarez Icaza (mexicain). D’autres voix avançaient que les institutions mexicaines auraient dû être en charge du dossier – rappelons que c’est l’Etat mexicain lui-même qui a sollicité l’aide de la CIDH. Un des acteurs les plus critiques sur la présence du GIEI a été l’Armée mexicaine –celle-ci est mentionnée dans le rapport pour son inaction dans les faits. Le général Salvador Cienfuegos, Ministre de la Défense, a offert des interviews aux médias, fait inhabituel. Il a refusé que des experts internationaux s’entretiennent avec les soldats du 27ème bataillon d’infanterie, installé dans les alentours d’Iguala: “Nous n’obéissons qu’aux autorités mexicaines”, a-t-il déclaré. Certains médias ont signalé que cette posture, loin de servir l’Armée, alimente les soupçons.

La critique vient aussi de l’intérieur

Un an depuis le début de l'affaire Ayotzinapa, activités à San Cristóbal de Las Casas, Chiapas © SIPAZ
Un an depuis le début de l’affaire Ayotzinapa, activités à San Cristóbal de Las Casas, Chiapas © SIPAZ
Mi-septembre, la Chambre des Députés a nommé huit personnes à la Commission Spéciale Ayotzinapa. Cette formation a commencé à interroger plusieurs fonctionnaires, dont l’ex-gouverneur du Guerrero, l’ex-Procureur de l’état et le général Cienfuegos. Celui-ci a finalement accepté que les éléments du 27ème Bataillon soient entendus, mais seulement en présence d’un supérieur hiérarchique, ceci afin d’éviter des “intimidations”. Ces entretiens se sont déroulés de façon informelle et, malgré la requête de la Commission, le PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel) a empêché que les convocations suivantes ne soient des comparutions officielles.
Les sondages révèlent par ailleurs un fort mécontentement parmi la population. Selon le Latinobaromètre de 2015, les habitants du Mexique sont les moins satisfaits de leur démocratie: 19% des personnes interrogées déclarent être contentes du gouvernement, soit la moitié de la moyenne régionale. 26% seulement pensent que les élections se déroulent de façon régulière. 21% des sondés considèrent que la façon dont le pays est gouverné profite à la société, et non seulement à quelques-uns. 18% d’entre eux pensent que le pays progresse.

Un contexte économique au moins aussi inquiétant

En ce qui concerne la situation économique intérieure, le Latinobaromètre révèle également que le Mexique occupe l’avant-dernière place. Dans un contexte de faible croissance économique, de dévaluation du peso, d’augmentation de la pauvreté et face à l’effondrement du prix du pétrole, plusieurs initiatives prises par le gouvernement sur le plan économique ont suscité plus d’inquiétudes qu’elles n’ont généré d’optimisme.
En octobre, 11 pays du littoral Pacifique, dont le Mexique, ont finalisé les négociations autour de l’Accord de Partenariat Transpacifique (TPP). Son entrée en vigueur reste toutefois soumise à l’approbation des législateurs de chaque pays signataire. Parmi ses supposés avantages figurent la réduction des taxes douanières et la possibilité d’entrer en concurrence sur l’un des plus grands marchés au monde. Le traité en question a cependant entraîné une polémique, les négociations ayant été menées en secret. Même si peu d’informations ont fuité, plusieurs éléments divulgués signalent un possible renforcement des droits des multinationales, au détriment de ceux  des populations. Il établirait en outre un système de règlement des conflits entre investisseurs et Etats qui limiterait le pouvoir des nations de contrôler les potentiels abus des entreprises étrangères.
D’autre part, en décembre, le projet présidentiel de créer des Zones Economiques Spéciales (ZES) a été approuvé par la Chambre des Députés. Les permis de développement et d’administration de ces zones pourraient être accordés pour des périodes allant jusqu’à 40 ans. Le gouvernement fédéral pourra, pour leur construction, déclarer une aire comme étant d’utilité publique et confisquer des terrains. Les premières de ces zones seront situées à Puerto Chiapas, dans le Corridor Interocéanique de l’Isthme de Tehuantepec (dans les états de Oaxaca et Veracruz) et à Puerto Lázaro Cárdenas (Michoacán). Pour le Front Indigène et Paysan du Mexique, cette initiative “a pour objet de légaliser les expropriations”.

GUERRERO: la crise s’exprime de façon extrême

Un an depuis le début de l'affaire Ayotzinapa, activités à San Cristóbal de Las Casas, Chiapas © SIPAZ
Un an depuis le début de l’affaire Ayotzinapa, activités à San Cristóbal de Las Casas, Chiapas © SIPAZ
La perception de crise politique et sociale, et d’extrême violence perdure dans cet état en dépit des changements de gouvernement à échelle étatique et municipale. Les médias ont signalé des liens probables entre certains maires et députés de la LXIème législature et le narco-traffic, acteur-clé pour comprendre le niveau de violence atteint dans l’état. A son arrivée en août 2015 et de manière frappante, le nouveau gouverneur Héctor Astudillo (PRI), a organisé une réunion publique à Acapulco avec les ministres de la défense, de la marine et de l’Intérieur. L’arrivée de milliers de nouvelles troupes fédérales a été annoncée dans le but de « renforcer la sécurité ». Le général Alejandro Saavedra Hernández, commandant de la IXa Région Militaire, a en outre été nommé coordinateur général de la nouvelle stratégie de sécurité publique d’Astudillo. Les analystes considèrent cela comme une violation de la Constitution qui indique que “en temps de paix, aucune autorité militaire ne peut exercer plus de fonctions que celles qui ont un rapport direct avec la discipline militaire”. Son secrétaire de Gouvernement est Florencio Salazar Adame, ancien député, maire et dirigeant du PRI. En 2000, il a collaboré à la campagne électorale de Vicente Fox (PAN : Parti d’Action Nationale), qui l’a par la suite nommé coordinateur du “Plan Puebla-Panamá” et secrétaire de la Réforme agraire.
Les évêques catholiques de l’état ont déclaré que ce changement de gouvernement intervenait “au milieu d’une grave crise sociale, politique, économique et de Droits de l‘Homme”. Dans le document Engagement pour Guerrero et pour la Paix, ils réclament un programme, porté par les institutions et le secteur social, pour reconstruire le tissu social et rétablir l’état de Droit. Ils souhaitent également qu’un plan de développement intégral et soutenable soit élaboré. Ces processus doivent, selon eux, prévoir un dialogue avec le crime organisé.
Pendant tout ce temps, les proches des étudiants d’Ayotzinapa disparus en 2014 ont agi pour que la lumière soit faite sur ces événements tragiques. Lors d’une réunion en septembre avec le président Enrique Peña Nieto, ils ont déposé huit doléances pour poursuivre les investigations. L’une d’elles demande que l’enquête soit menée par une unité spécialisée, option alors écartée par le Président. En novembre, 8 autobus avec à leur bord 150 futurs enseignants d’Ayotzinapa ont été interceptés par des policiers et des militaires pour les empêcher de transporter de l’essence. L’opération a dégénéré, laissant une vingtaine d’étudiants blessés, dont 4 gravement ; 13 ont également été arrêtés. Leur avocat a déclaré que des éléments de la police de l’état avaient brûlé 3 des étudiants interpelés avec des cigarettes, et que certains avaient été déshabillés complètement pour les humilier. Tous ont par la suite été relâchés. Les contestataires ont demandé au gouverneur Astudillo Flores de ne pas criminaliser la protestation sociale. En décembre, les parents des étudiants disparus ont levé leur sit-in de 5 jours près de la résidence du Président de la République, après l’annonce par la procureure Arely Gómez González de la création de la nouvelle Unité Spéciale d’Investigation, qui sera assistée par le GIEI.
Un autre mouvement social important est généré par une partie non négligeable du corps enseignant opposée à la réforme éducative approuvée en 2013. Le désaccord porte particulièrement sur l’ « examen de diagnostic », considéré par beaucoup comme une manière de justifier des renvois arbitraires. En décembre, le secrétaire à l’Education Nationale de Guerrero a affirmé que des professeurs s’étaient inscrits à l’examen dans le seul but d’entraver le processus : 70 d’entre eux ont déconnecté du réseau les 2800 ordinateurs habilités. 6 000 policiers fédéraux ont été envoyés en renfort pour s’assurer que l’examen ait lieu.

Chiapas: Des barrages routiers, et encore des barrages routiers

Campement des familles déplacées de Primero de Agosto © SIPAZ
Campement des familles déplacées de Primero de Agosto © SIPAZ
La situation au Chiapas ces 3 derniers mois a été marquée par de nombreux barrages routiers, installés dans tout l’état par différents acteurs sociaux, principalement en réaction aux résultats des élections municipales de juillet. Certains de ces barrages ont dégénéré en violences ; tous ont drastiquement réduit la libre-circulation pendant des jours.
L’un des acteurs de ces protestations est le corps enseignant. Le 18 octobre, jour prévu pour l’examen de diagnostic des membres de la section 7 du Chiapas “ont été victimes de répression violente quand ils ont tenté de se rassembler, pacifiquement selon leurs dires ; la section 40 [du secteur sanitaire] participait également à ce rassemblement”. Selon des sources médiatiques, “les autorités ont rapporté trois policiers frappés et un autre retenu par les professeurs. Ces derniers ont dénoncé que trois de leurs compagnons avaient été blessés par des balles en caoutchouc, quatre frappés par des policiers et deux arrêtés. Policiers et enseignants ont par la suite procédé à une échange d’‘otages’”. Lors de la tentative de reprogrammation de l’examen en novembre, la CNTE a organisé des manifestations qui ont rassemblé plus de 30 000 enseignants et enseignantes. Les nouvelles dates annoncées pour la tenue de l’évaluation, les 12 et 13 décembre, ont été modifiées  au dernier moment par les autorités pour éviter les troubles. Des professeurs ont tenté d’empêché l’accès aux lieux de l’examen qui étaient des installations militaires. Un professeur est décédé dans des affrontements avec la police, six ont été arrêtés et plusieurs blessés. David Gemayel Ruiz est le troisième enseignant à trouver la mort dans le cadre de manifestations contre cet examen, après la mort en février et en mars 2015 de deux professeurs dans l’état de Guerrero. Après des négociations avec les autorités fédérales, la CNTE a appelé les professeurs en grève depuis 3 jours à reprendre le travail.

Impunité toujours intacte

Au second semestre 2015, de nombreux exemples ont mis en évidence l’impunité régnant. En septembre, à Masoja Shucja (municipalité de Tila), cent personnes ont célébré la mémoire des personnes assassinées et disparues entre 1994 et 1999 dans la région. En octobre, les tojolabales originaires du village Primero de Agosto et déplacé(e)s de force ont dénoncé que “à cause de l‘immobilisme des autorités, nous continuons d’être victimes de menaces de mort, d’enlèvement ou d’une nouvelle expulsion, et de harcèlement, entre autres violations de nos DroitsEn octobre également, la Société Civile Las Abejas d’Acteal a participé à une audience publique de la Commission Interaméricaine des Droits de l‘Homme à Washington dans le cadre de l’affaire du Massacre d’Acteal (1997). Las Abejas ont répété que “ce massacre a été organisé par l’Etat lui-même”. Las Abejas ont par la suite déclaré que, face “au cynisme de l’Etat mexicain qui nie sa responsabilité dans le massacre d’Acteal; (…) nous REFUSONS une solution à l’amiable”.

Menaces et  intimidations une fois de plus dénoncées

Commémoration à Masojá Shucjá, zone Nord du Chiapas, septembre 2015 © SIPAZ
Commémoration à Masojá Shucjá, zone Nord du Chiapas, septembre 2015 © SIPAZ
En septembre, Alejandro Díaz Sántiz, prisonnier à San Cristóbal de Las Casas et Solidaire de la Voz del Amate, a été transféré, ainsi que 386 autres personnes emprisonnées dans 13 étblissements pénitentiaires de l’état, vers une prison près de Tapachula. Les détenus considérés comme les plus dangereux ont été déplacés dans le cadre de cette opération. Le groupe de travail “No estamos todxs” a qualifié de “vengeance politique de la part du mauvais gouvernement à l’encontre d’Alejandro, ainsi puni pour soutenir et sensibiliser les autres prisonniers ”.
En septembre toujours, le Centre de Droits de l’Homme Fray Bartolomé de Las Casas a dénoncé les menaces de mort et d’agression reçues par les Bases de Soutien de l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN) de Tzakukum (municipalité de Chalchihuitán). Un conflit couve depuis juillet 2015, date à partir de laquelle des membres du PRI ont commencé la construction de salles de classe sur des terrains communs, ceci sans consulter au préalable les Bases de Soutien. En décembre le Centre Fray Bartolomé a par ailleurs dénoncé les manquements aux procedures en bonne et due forme observés lors de la détention de José Alfonso Cruz Espinosa, également Base de Soutien de l’EZLN.
Le 2 décembre, le Centre des Droits des Femmes au Chiapas a publiquement dénoncé et porté plainte pour les menaces et intimidations à son encontre. La plainte fait mention de surveillance et de plusieurs appels téléphoniques, d’autant plus inquiétants qu’ils se référent à des informations d’ordre personnel.
Décembre a également vu le cambriolage du domicile  de Julio César Ortega, collaborateur du CIDECI – Unitierra Chiapas et membre de l’équipe de soutien de la Sixième Commission de l’EZLN. Quatre personnes ont violemment pénétré chez lui, frappé et ligoté son fils de 25 ans, présent à ce moment-là. Ils lui ont demandé où était son père et ont déclaré avoir été payés pour assassiner ce dernier. Les hommes se sont enfuis en emportant des biens de peu de valeur.
Le 16 décembre, des indigènes de l’ejido Tila ont voté en assemblée la récupération des terres ejidales (communales) sur lesquelles se trouvait la mairie. Ils ont détruit le bâtiment et ont déclaré demander depuis plus de 50 ans l’attention des autorités sans jamais avoir été reçus ni entendus. Par la suite, ils ont démenti les informations parues dans les médias locaux selon lesquelles “il n’y eut ni violence ni affrontements”. Ils ont accusé le chef de la police municipale d’avoir tiré sur l’un des leurs, et le maire de remettre en place le groupe paramilitaire Développement, Paix et Justice. Ce dernier est impliqué dans 86 assassinats, 37 disparitions et le déplacement forcé de plus de 4000 personnes survenus entre 1995 et  2000.

OAXACA: la criminalisation du mouvement social est pointée

Rencontre Rivières et Montagnes en Danger, Oaxaca, novembre 2015 © SIPAZ
Rencontre Rivières et Montagnes en Danger, Oaxaca, novembre 2015 © SIPAZ
En novembre, Gabino Cué Monteagudo, gouverneur de l’état de Oaxaca, a envoyé son secrétaire général présenter le 5ème rapport de gouvernement au Congrès local. La Section 22 du CNTE avait en effet annoncé qu’elle y serait présente ;  près de 2000 membres de la police fédérale et de l’état ont en conséquent encerclé le Congrès. Comme dans d’autres états, la CNTE a manifesté sous diverses formes son opposition à l’examen de diagnostic. Différentes organisations sociales et civiles sont  d’accord sur le fait que la criminalisation et les coups portés à la Section 22 entraînent une baisse de la mobilisation citoyenne.
Avant cet épisode, 52 personnes avaient été interpellées dans la ville de Oaxaca après la marche du 2 octobre, qui commémore le massacre des étudiants en 1968 à Tlatelolco. Le Réseau des Femmes Activistes et Défenseures des Droits de l’Homme de Oaxaca a dénoncé “la stratégie évidente qui utilise des coups montés pour criminaliser le mouvement social”. Toutes les personnes arrêtées ont été remises en liberté dix jours après, sans aucune charge retenue contre elles.
En octobre, des représentants de la communauté indigène binni’zaa de Juchitán de Zaragoza ont annoncé que tous les permis accordés par les autorités locales et fédérales avaient été suspendus, résultat de la procédure juridique qu’ils avaient lancée contre le mégaprojet d’Energía Eólica del Sur sur leur territoire. Ils ont dénoncé que “cette décision de justice ait comme conséquence l’aggravation du harcèlement à l’encontre des personnes à l’origine de la procédure ”. Ils ont réaffirmé que “il n’y a pas eu de consultation publique : le projet a été approuvé en janvier 2015 (…), et ce n’est qu’en juin de cette même année qu’une prétendue consultation a été organisée. Elle n’a finalement été qu’une simulation”.
En novembre, des représentants de 50 communautés de la Côte et de la Sierra Sur, et des organisations civiles ont dénoncé l’existence d’au moins 14 projets hydro-électriques sur la Côte de Oaxaca, en plus des projets miniers, menaçant le territoire des peuples de la région. Ils ont déclaré pendant le forum régional“Fleuves et montagnes en danger” que les autorités fédérales et de l’état cherchaient à relancer nombre de ces projets.
L’impunité continue pour l’assassinat de Bety Cariño et Jyri Jaakkola (finlandais), commis en 2010 pendant une caravane humanitaire dans la région Triqui. Les députés européens Satu Hassi et Ska Keller, n’ont été reçus par aucun représentant du gouvernement de Gabino Cué Monteagudo lors de leur visite officielle en octobre. Satu Hassi, également parlementaire finlandais, a déclaré que leur venue au Mexique était due au fait que “il n’y a aucune avancée, il ne s’est rien passé, il ne se passe rien. J’en conclue à un manque total de volonté” pour arrêter les auteurs de ces crimes. Hassi a ajouté qu’ils “[voient] une structure commune entre les cas de Jyri Jaakkola et Bety Cariño et l’affaire des 43 disparus d’Ayotzinapa”. Il a conclu que les deux dossiers étaient symptômes de la même maladie, l’impunité.

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