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lunes, 30 de octubre de 2017

Conseil Indigène de Gouvernement dans le caracol de la Garrucha: "La tempête est déjà là"

La tempête est déjà là – Le Conseil Indigène de Gouvernement à La Garrucha

Article de Radio Zapatista.
traduction 7NubS
Dans la jungle, quand il pleut, on a l’impression que c’est le ciel qui tombe...
L’esplanade du caracol de La Garrucha s’était transformée en un champ rouge et noir de passe-montagnes et de bandanas incrusté dans la verdeur des montagnes, et dans la joie qui se dégage des fresques repeintes ou venant à peine d’être réalisées, qui décorent tous les bâtiments du caracol. Sur la grande estrade, les conseillères et les conseillers du Conseil Indigène de Gouvernement et Marichuy, leur porte-parole, observaient toute cette multitude festive tandis que le Conseil de Bon Gouvernement et le Commandement Général de l’EZLN souhaitaient la bienvenue.

Et c’est au moment où Marichuy a pris la parole pour la céder en premier lieu à trois conseillères du CIG, que la pluie a commencé. Un violent torrent de pluie étouffant la voix des conseillères, de Marichuy et de la commandante Rosalinda du Comité Clandestin Révolutionnaire Indigène – Commandement Général de l’EZLN. Le champ rouge et noir s’est alors transformé en une mer de parapluies et de cirés en plastique, sous lesquels les bases de soutien zapatistes et les délégués du CNI sont restés stoïques, criant des hourras, résistant à la tempête non pas avec la résignation, mais avec joie et détermination. Même un enfant de moins d’un an, emmitouflé dans un grand châle et protégé par un parapluie, enlevait avec tendresse les gouttes qui tombaient du bras de sa mère.
« Nous disions que la tempête se rapproche », dit Marichuy durant son discours, « mais je crois bien qu’elle est déjà là ».
Depuis plus de deux ans, l’EZLN ne cesse d’avertir sur l’imminence de la tempête. En avril 2015, le sous-commandant Galeano expliquait : « Nous sommes montés au sommet de la ceiba pour tenter de regarder au loin, non pas ce qui a déjà lieu, mais ce qui se profile. Et bien, ce que nous voyons n’est pas bon du tout. Nous voyons que quelque chose de terrible approche, encore plus destructeur même, bien que cela semble impossible ».
C’est pour cette raison, parce que les zapatistes voyaient arriver la tempête, qu’ils ont alors organisé le séminaire « La pensée critique face à l’hydre capitaliste » en mai 2015, auquel ont participé des intellectuels de nombreux endroits du Mexique et du monde, afin de réfléchir sur le contexte actuel. Sur place, les zapatistes partagèrent leur « regard sur l’hydre », et également leur « regard vers l’intérieur », expliquant comment s’organisent les communautés zapatistes en termes d’économie politique, comment la résistance et la rébellion leur servent de principales armes pour affronter la tempête et comment, dans ce contexte, luttent les femmes zapatistes.
En février 2016, les sous-commandants Moisés et Galeano partageaient une analyse de la situation des communautés indiennes liées aux partis politiques, à partir de données spécifiques et des histoires de communautés qu’ils avaient pu observer. Ensuite, dans un autre communiqué, ils firent un rapport détaillé sur comment vivent et s’organisent les communautés zapatistes en vue d’affronter la tempête. Le message était clair : ceux qui, au lieu de s’organiser, parient sur la voie de l’assistancialisme gouvernemental se retrouvent spoliés, expulsés et humiliés.
C’est aussi pour affronter la tempête que l’EZLN organisa le festival artistique « pARTage pour l’Humanité » et le moment de partage scientifique « ConSCIENCES pour l’Humanité ».
Durant cette dernière, dans un texte intitulé « Le chat-chien et l’apocalypse », le SupGaleano écrivait cela : « Selon nos analyses (et jusqu’à maintenant nous n’avons vu ni personne ni rien qui les réfutaient, mais plutôt, à l’inverse, qui les confirmaient), nous sommes déjà au milieu d’une crise structurelle qui, en termes familiers, signifie l’empire de la violence criminelle, des catastrophes naturelles, de la pénurie et du chômage effrénés, du manque de services de base, de l’effondrement énergétique, des migrations, de la faim, de la maladie, de la destruction, de la mort, du désespoir, de l’angoisse, de la terreur, de l’abandon. En résumé : la déshumanisation. Un crime est en cours. Le plus grand, le plus brutal et le plus cruel dans la courte histoire de l’humanité. Le criminel est un système prêt à tout : le capitalisme. En termes apocalyptiques : c’est une lutte entre l’humanité et le système, entre la vie et la mort. (…) En résumé : dites non à la mort et oui à la vie. Mais ne vous trompez pas. Vous devrez lutter tous les jours, à toutes les heures et partout. Dans cette lutte, tôt ou tard, vous vous rendrez compte que c’est seulement de manière collective que vous aurez des chances de triompher. »
C’est à partir de cette même analyse, cette fois faite depuis les peuples indigènes du Mexique, que naquit l’initiative du Conseil Indigène de Gouvernement, durant le 20e anniversaire du Congrès National Indigène.
C’est face à la tourmente que les commandantes, les conseillères et la porte-parole ont tellement insisté durant ces rencontres, sur la nécessité d’unir les forces entre les communautés, divisées comme elles le sont du fait de l’offensive gouvernementale par le biais des projets assistancialistes, et entre la ville et la campagne.
Comme l’exprime Marichuy :
« Le temps des peuples est venu, il est temps que nous nous unissions, il est temps qu’ensemble nous chassions ces grands capitalistes qui durant tant d’années ont spolié nos terres. Ils nous ont divisé, ils nous ont poussé à nous battre entre nous (…) Maintenant il est temps mes frères de s’unir, de penser ensemble ce que nous allons faire, comment nous allons nous mettre à construire ce Mexique nouveau. »
En ce moment, au moment d’écrire ces quelques phrases, dans cet intermède provoqué par la tempête, la musique est venue inonder le caracol et le bal ranimer l’ambiance. Les bottes, les sandales et les huaraches sautillent allègrement dans la boue, tandis que le manteau de la nuit retombe sur la jungle. Le temps des peuples est venu.

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