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miércoles, 26 de febrero de 2020

"Nos morts violentes, disparitions, douleurs sont un profit pour le système capitaliste": femmes Zapatistes 2nde rencontre internationale de femmes qui luttent

Paroles des femmes zapatistes lors de l’inauguration de la Seconde Rencontre internationale de femmes qui luttent


 ARMÉE ZAPATISTE DE LIBÉRATION NATIONALE
MEXIQUE
 27 décembre 2019
Compañeras et sœurs,
Bienvenue à toutes sur ces terres zapatistes,
Bienvenue aux sœurs et compañeras des différentes géographies des cinq continents,
Bienvenue aux compañeras et sœurs du Mexique et du monde,
Bienvenue aux sœurs et compañeras des Réseaux de Résistance et de Rébellion,
Bienvenue aux compañeras du Congrès National Indigène-Conseil Indigène de Gouvernement,
Bienvenue aux compañeras de la Sexta nationale et internationale,
Bienvenue aux compañeras des bases de soutien zapatistes,
Bienvenue aux compañeras miliciennes et insurgées de l’EZLN.

Sœur et compañera,

Nous t’informons que, jusqu’à hier, 26 décembre 2019, s’étaient inscrit.e.s pour cette seconde rencontre

3259 femmes,
95 enfants,
26 hommes

des 49 pays suivants :

  1. Allemagne
  2. Algérie
  3. Argentine
  4. Australie
  5. Autriche
  6. Bangladesh
  7. Belgique
  8. Bolivie
  9. Brésil
  10. Canada
  11. Catalogne
  12. Chili
  13. Colombie
  14. Costa Rica
  15. Danemark
  16. Équateur
  17. Salvador
  18. Espagne
  19. États-Unis
  20. Finlande
  21. France
  22. Grèce
  23. Guatemala
  24. Honduras
  25. Inde
  26. Angleterre
  27. Irlande
  28. Italie
  29. Japon
  30. Kurdistan
  31. Macédoine
  32. Norvège
  33. Nouvelle Zélande
  34. Pays Basque
  35. Paraguay
  36. Pérou
  37. Pologne
  38. Porto Rico
  39. Royaume-Uni
  40. République dominicaine
  41. Russie
  42. Sibérie
  43. Sri Lanka
  44. Suède
  45. Suisse
  46. Turquie
  47. Uruguay
  48. Venezuela
  49. Mexique
Compañera et sœur,

Nous sommes très contentes que tu aies pu arriver jusqu’à nos montagnes et, si tu n’as pas pu venir, nous te saluons aussi parce que tu es attentive à ce qui se passera ici lors cette seconde rencontre internationale de femmes qui luttent.

Nous savons bien que tu as souffert pour arriver jusqu’ici. Nous savons que tu as dû laisser ta famille et tes amis. Nous savons bien quel effort et quel travail tu as dû faire pour pouvoir te payer le voyage et venir de ta géographie jusqu’à la nôtre.

Mais nous savons bien aussi que ton cœur est content car ici tu vas rencontrer d’autres femmes qui luttent.

Peut-être que soudain cela t’aidera dans ta lutte d’écouter et de connaître d’autres luttes menées en tant que femmes que nous sommes.

Que nous soyons en accord ou pas avec d’autres luttes et leurs manières et leurs géographies, à toutes, cela nous sert d’écouter et d’apprendre.

C’est pour cela qu’il ne s’agit pas d’entrer en compétition pour voir quelle est la meilleure lutte ; l’idée, c’est de partager et de partager avec nous.

C’est pour cette raison que nous te demandons de toujours respecter les différentes pensées et les différentes manières.

Toutes celles qui sont ici, et bien d’autres qui ne sont pas présentes, nous sommes des femmes qui luttons.

Nous avons des façons de faire différentes, c’est certain.

Mais tu sais que notre pensée en tant que zapatistes que nous sommes est que ça ne sert à rien que toutes, nous ayons les mêmes pensées et les mêmes manières.

Nous pensons que la différence n’est pas une faiblesse.

Nous pensons que la différence est une force puissante s’il y a du respect entre nous et qu’il existe un accord pour lutter ensemble mais sans perdre nos particularités.

Nous te demandons donc que tu partages ta douleur, ta rage et ta lutte avec dignité et que tu respectes les autres douleurs, les autres rages et les autres dignes luttes.

Compañera et sœur,

Nous avons fait tout notre possible pour que tu sois contente et en sécurité.

Ça semble simple à dire, mais nous savons bien qu’il y a bien peu d’endroits dans le monde où nous pouvons être contentes et en sécurité.

Et c’est pour ça que nous sommes là, parce que ce qui nous mène ici c’est notre douleur et notre rage contre la violence dont nous souffrons, nous les femmes, pour le seul délit d’être femme.
Comme tu pourras le voir ces jours-ci, la présence d’hommes en ce lieu n’est pas permise.

Qu’importe si ce sont des hommes bons, ou si ce sont des hommes ordinaires, ou si ce sont  “des hommes on n’y peut rien”, ils ne peuvent pas être ici durant ces journées.

Ce lieu et ces journées sont seulement pour les femmes qui luttent, c’est-à-dire pas n’importe quelle femme.

Les compañeras insurgées et les miliciennes sont chargées de prendre soin de nous et de nous protéger ces jours-ci et en ce lieu.

Nous avons aussi fait l’effort pour que tu aies un endroit où te reposer, où manger et où faire ta toilette.

Que ce soit pour le repos, la nourriture ou la toilette, nous te demandons que tu te comportes en sœur et en compañera surtout avec les femmes qui sont «de sagesse», c’est-à-dire celles qui sont âgées.

Nous devons les respecter car elles ne sont pas nouvelles dans la lutte d’en tant que femme que nous sommes.

Leurs cheveux blancs, leurs maladies, leurs rides, elles ne les ont pas obtenues en se vendant au système patriarcal.

Ni en se rendant au machisme.
Ni en capitulant ou en ayant changé de pensée de la lutte pour les droits des femmes que nous sommes.

Elles sont qui elles sont parce qu’elles ne se sont pas vendues, ni rendues, ni ont capitulé.
Et aux femmes âgées, de sagesse, nous leur demandons aussi de respecter et de saluer les plus jeunes, qu’elles soient adultes ou enfants.

Car cette lutte est aussi la leur. Et elles ne manquent ni de décision, ni d’engagement.

Si nous ne laissons pas les géographies nous diviser, alors ne laissons pas non plus les calendriers nous diviser.

Toutes, quel que soit le calendrier que nous portons ou la géographie dans laquelle nous vivons, nous faisons la même chose : nous luttons pour nos droits en tant que femmes que nous sommes.

Par exemple, pour notre droit à la vie.

Et c’est là que nous sommes tristes et remplies de chagrin parce que, plus d’un an après la première rencontre, nous ne pouvons pas rendre de bons comptes.

Partout dans le monde, on continue à tuer des femmes, à les faire disparaître, à les violenter et à les mépriser.

Cette année, les violences, les disparitions et les meurtres de femmes n’ont pas cessé.
Ce qu’on sait, c’est qu’ils ont augmenté.

Et nous, en tant que zapatistes, nous le voyons comme quelque chose de très grave.
C’est pour cela que nous avons convoqué cette deuxième rencontre sur un seul thème : la violence contre les femmes.

Sœur et compañera, toi qui as pu arriver jusqu’ici et toi qui n’as pas pu, nous voulons t’écouter et te regarder car nous avons des questions à te poser.

Comment t’es-tu organisée ?
Qu’est-ce que tu as fait ?
Que s’est-il passé ?
Parce que, rappelle-toi que lors de notre première rencontre, nous nous sommes engagées à nous organiser dans nos différents lieux, pour qu’il n’y ait plus d’assassinées, de disparues, d’humiliées, de méprisées.

Mais nous voyons que c’est encore pire qu’avant.
Ils disent que l’égalité des genres existe car dans les mauvais gouvernements, il y a autant d’hommes que de femmes qui mal-dirigent.
Mais ils continuent de nous assassiner.

Ils disent que les femmes ont maintenant plus de droits par rapport à leur salaire.
Mais ils continuent de nous assassiner.
Ils disent que les luttes féministes ont beaucoup avancé.
Mais ils continuent à nous assassiner.
Ils disent que maintenant la parole des femmes compte plus.
Mais ils continuent à nous assassiner.
Ils disent que maintenant les femmes sont prises en compte.
Mais ils continuent à nous assassiner.
Ils disent que maintenant il y a plus de lois qui protègent les femmes.
Mais ils continuent à nous assassiner.
Ils disent que maintenant c’est très bien vu de parler en bien des femmes et de leurs luttes.
Mais ils continuent à nous assassiner.
Ils disent qu’il y a des hommes qui comprennent la lutte de celles que nous sommes en tant que femmes et qui vont même jusqu’à se dire féministes.
Mais ils continuent à nous assassiner.
Ils disent que les femmes sont maintenant présentes dans plus d’espaces.
Mais ils continuent de nous assassiner.
Ils disent que maintenant il y a même des supers héroïnes dans les films.
Mais ils continuent de nous assassiner.
Ils disent qu’ils sont plus conscients du respect envers la femme.
Mais ils continuent de nous assassiner.
Chaque fois plus d’assassinées.
Chaque fois plus brutalement.
Chaque fois avec plus de hargne, de colère, de jalousie et de haine.
Et chaque fois plus impunément.

En d’autres mots, il y a chaque fois plus de machos qui ne sont pas punis, qui ne sont pas condamnés, comme si de rien n’était, comme si assassiner une femme, la faire disparaître, l’exploiter, l’utiliser, l’agresser, la mépriser, ce n’était rien.

Ils continuent de nous tuer et en plus ils nous demandent, exigent de nous, nous ordonnent de bien nous comporter. Et on a peine à le croire mais, qu’un groupe de travailleuses et travailleurs bloque une route, ou fasse grève, ou manifeste, ça fait un grand scandale.

Ils disent qu’on viole les droits des marchandises, des voitures, des objets.
Et dans les médias il y a des photos, des vidéos, des reportages, des analyses et des commentaires contre ces manifestations.

Mais qu’on viole une femme, c’est à peine s’ils ajoutent ou suppriment un chiffre dans leurs statistiques.

Et que les femmes protestent et taguent les monuments de ceux d’en-haut, qu’elles brisent leurs vitres, qu’elles leurs crient leurs vérités à ceux d’en-haut, alors là oui, gros tapage.
Mais s’ils nous font disparaître, nous assassinent, alors ils ne font qu’ajouter un chiffre : une victime de plus, une femme de moins.

Comme si le puissant souhaitait montrer clairement que ce qui est important est son profit,  pas la vie.
Les voitures, les pierres, les vitres, les marchandises ont de la valeur.
La vie ne vaut rien.
Et si c’est la vie d’une femme, eh bien elle vaut encore moins.
C’est pour ça que nous, en tant que zapatistes que nous sommes, c’est à dire que nous sommes anticapitalistes et antipatriarcales, eh bien nous y avons réfléchi, à pourquoi le système marche comme ça.

Et donc, eh bien il semble que nos morts violentes, nos disparitions, nos douleurs, soient un profit pour le système capitaliste, parce que le système ne permet que ce dont il peut tirer un bénéfice, que ce qui lui fait gagner de l’argent. C’est pourquoi nous disons que le système capitaliste est patriarcal.
C’est le patriarcat qui vaut et qui commande, même si la contremaître est une femme.
Ce que nous pensons, c’est que pour lutter pour nos droits, par exemple le droit à la vie, il ne suffit pas de lutter contre le machisme, le patriarcat ou comme vous voudrez l’appeler.
Nous devons aussi lutter contre le système capitaliste.

Cela va de pair, c’est ce que nous disons nous les femmes zapatistes.
Mais nous savons qu’il y a d’autres pensées et d’autres modes de lutte de celles que nous sommes en tant que femmes.
Soudain, nous comprenons quelque chose.
Soudain, nous apprenons quelque chose.
C’est pour cela que nous invitons toutes les femmes qui luttent.
Peu importe leur pensée ou leur manière.
Ce qui importe c’est que nous luttions pour notre vie, qui maintenant plus que jamais est en danger partout et tout le temps.
Même s’ils disent et prêchent qu’il y a beaucoup d’avancées pour les femmes, la vérité c’est que jamais avant dans l’histoire de l’Humanité il n’a été aussi mortel d’être une femme.
Tu as vu, compañera et sœur, qu’ils disent que telle ou telle profession est la plus dangereuse.
Que c’est plus dangereux d’être journaliste, ou d’être force répressive, ou d’être juge, ou d’être un mauvais gouvernement.

Mais, toi comme nous, nous savons que le plus dangereux maintenant dans le monde c’est d’être femme.
Peu importe si c’est une femme enfant, jeune ou adulte ou âgée.
Peu importe si elle est blanche, jaune, rouge ou de la couleur de la terre.
Peu importe si elle est grosse, maigre, grande, petite, belle ou moche.
Peu importe si elle est de classe élevée, moyenne ou basse.
Peu importe sa langue, sa culture, ses croyances, son militantisme.
A l’heure de la violence, ce qui importe uniquement c’est d’être femme.

Sœur et compañera :
En tant que zapatistes que nous sommes, nous savons qu’ils nous donneront beaucoup d’exemples de femmes qui ont avancé, qui ont triomphé, qui ont gagné des prix et de bons salaires, qui ont réussi, comme ils disent.

Nous répondons en leur parlant des violentées, des disparues, des assassinées. Alors nous leur répondons que, là-haut, ils parlent de droits conquis par quelques-unes de là-haut.
Alors nous leur disons, nous leur expliquons, nous leur crions qu’il manque le plus élémentaire des droits pour toutes les femmes, le plus important : le droit à la vie.
Et nous l’avons déjà souvent dit, compañera et sœur, mais maintenant nous le répétons : le droit à la vie et tous les autres droits que nous méritons et dont nous avons besoin, personne ne va nous les offrir.

L’homme ne va pas nous les offrir, que celui-ci soit mauvais, bon, ordinaire ou “on n’y peut rien”.
Le système capitaliste ne nous les offrira pas, peu importe le nombre de lois ou de promesses qu’il fasse.

Le droit à la vie, et tous les droits, nous devons les conquérir.
Tout le temps et en tous lieux.
C’est à dire que pour les femmes qui luttent il n’y a pas de repos.
Sœur et compañera, nous devons nous défendre.
Nous auto-défendre en tant qu’individues et en tant que femmes.
Et surtout nous devons nous organiser pour nous défendre.
Nous soutenir toutes.
Nous protéger toutes.
Nous défendre toutes.
Et nous devons commencer maintenant.
Mes compañeras coordinatrices de la rencontre m’ont chargée de vous dire ces mots parce que je suis maman d’une petite fille et elle est ici avec moi.
Parce que notre devoir en tant que femmes que nous sommes et qui luttent est de nous protéger et de nous défendre.
Et d’autant plus si la femme est à peine une petite fille.
Nous devons la protéger et la défendre avec tout ce que nous avons.
Et si nous n’avons plus rien, alors avec des bâtons et des pierres.
Et si nous n’avons ni bâtons ni pierres, alors avec notre corps.
Avec nos ongles et avec nos dents, nous devons la protéger et la défendre.
Et apprendre aux petites filles à se protéger et à se défendre quand elles seront grandes et avec leurs propres forces.
C’est ainsi, sœur et compañera, nous devons vivre sur la défensive.
Et nous devons apprendre à nos enfants à grandir sur la défensive.
Et ce jusqu’à ce qu’elles puissent naître, s’éduquer et grandir sans peur.
Nous en tant que zapatistes pensons que c’est mieux pour cela d’être organisées.
Nous savons qu’il y a celles qui pensent que cela peut aussi se faire de manière individuelle.
Mais nous, nous le faisons organisées en tant que zapatistes que nous sommes.
Parce que nous sommes des femmes qui luttons oui, mais nous sommes des femmes zapatistes.
Pour cela, compañera et sœur, le résultat que nous t’apportons c’est que parmi nos compañeras zapatistes cette année, aucune n’a été assassinée ou portée disparue.
Oui, nous avons quelques cas, selon la dernière réunion que nous avons eue, de violence contre la femme.

Et nous sommes en train de voir comment punir les responsables, tous des hommes.
Et non seulement les autorités autonomes s’en occupent, mais nous aussi nous nous en occupons en tant que femmes zapatistes que nous sommes.
Et nous te disons aussi la vérité que parfois nous nous dispute entre nous, compañera et sœur. Nous nous disputons pour des bêtises de femmes que nous sommes.
Peut être que l’on perd du temps dans ces disputes débiles car maintenant nous sommes vivantes et en sécurité.

Parce qu’il y eut un temps durant lequel nous vivions seulement la mort.

Et, la vérité, en voyant comment sont les choses dans ton monde, ne te vexe pas sœur et compañera, mais nous espérons qu’arrive le jour où vous vous disputiez et vous vous battiez pour savoir qui est la plus jolie, la plus jeune, la plus intelligente, la mieux habillée, plus de fiancés ou de fiancées, ou de maris ou d’épouses, ou parce que vous avez les même habits, parce que vos enfants sont meilleurs ou pires ou pour ces choses qui arrivent dans la vie.

Parce que ce jour-là, compañera et sœur, cela voudra dire que ça, la vie, n’est plus un problème. Alors peut-être pourrons-nous être aussi débiles que les hommes et raconter des blagues et des âneries.

Ou peut-être que non, peut-être que nous comprendrons donc que, libres et en vie, les problèmes sont autres et que différentes sont les disputes et les batailles.

Mais en attendant qu’arrive ce jour, sœur et compañera, eh bien, nous devons prendre soin de nous entre nous.
Nous protéger entre nous.
Et nous défendre entre nous.
Parce que tu le sais bien, compañera et sœur, nous sommes en guerre.
Eux pour nous tuer.
Nous pour vivre, mais vivre sans peur, bref vivre libres.
Et c’est à cause de cette peine, de cette rage que nous avons de ne pas pouvoir vivre libres, que nous voulons adresser un cri de rage au monde entier.
Et aussi un encouragement à lutter à toutes et chacune des femmes qui sont violentées physiquement et de toutes les manières existantes.
Et, en tant que femmes zapatistes, nous envoyons une accolade particulière aux familles et aux amis des femmes disparues et assassinées.
Une accolade qui leur fera savoir qu’elles ne sont pas seules et que, à notre façon et en notre lieu, nous accompagnons leur demande de vérité et de justice.
Parce que c’est pour cela que nous nous réunissons, sœur et compañera.
Pour crier notre peine et notre rage.
Pour nous accompagner et nous motiver.
Pour nous prendre dans les bras.
Pour savoir que nous ne sommes pas seules.
Pour chercher des chemins de soutien et d’entraide.
Voici notre petit mot, sœur et compañera.
Les insurgées et miliciennes ont préparé une discussion selon leur façon à elles et ça va se passer maintenant ; et c’est là que nous te rappellerons la petite lumière que nous t’avons donnée lors de la première rencontre.

Plus tard nous commencerons les travaux de cette réunion en consacrant toute la journée d’aujourd’hui aux plaintes.

Nous allons consacrer ce lieu et cette journée à dénoncer la violence dont nous souffrons.
Aujourd’hui c’est une seule table de plaintes et ici, le micro sera ouvert.
Ici nous allons pouvoir passer et prendre la parole et sortir notre rage, notre colère sur tout ce qu’ils nous font.
Et toutes nous allons écouter avec attention et respect.
Personne d’autre ne va écouter ce que nous dirons.
Seulement nous qui sommes des femmes qui luttons et qui sommes ici présentes.
Alors sans gêne, sœur et compañera, dis clairement ta douleur, pleure ta colère, crie ta rage.
Et sois-en sûre, qu’au moins nous, les zapatistes, nous allons faire une place dans notre cœur collectif et, à travers nous qui sommes ici, des dizaines de milliers de femmes indigènes zapatistes t’accompagneront.
Et ensuite, demain, nous devrons partager entre nous les idées, les travaux et les expériences que vous amenez pour trouver les chemins à prendre afin que se termine ce cauchemar de douleur et de mort.
Et le dernier jour de cette rencontre nous allons le consacrer à la culture, à l’art et à la fête.
Ainsi, un jour nous crions nos douleurs et nos colères.
Un autre jour, nous partageons des idées et des expériences.
Et le troisième jour, nous crions de joie et de force.
Parce que nous sommes des femmes qui souffrons.
Mais aussi nous sommes des femmes qui pensons et qui nous organisons.
Et, surtout, nous sommes des femmes qui luttons.
Et ça sera ainsi.
Alors maintenant, tu le sais, tu es la bienvenue compañera et sœur.
Toi qui es arrivée et toi qui n’es pas là mais qui y es avec le cœur.

-*-

Alors, au nom des femmes zapatistes de tous les âges, et à 13h57, heure zapatiste, du 27 décembre 2019, je déclare formellement inaugurée cette Seconde Rencontre internationale de femmes qui
luttent, ici dans les montagnes du Sud-est mexicain.

Depuis le semencier «Traces des pas de la commandante Ramona», Caracol “Tourbillon de notre parole”, montagnes zapatistes en résistance et en rébellion.

Commandante Amada.
Mexique, décembre 2019.

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