3* SEMINAIRE INTERNATIONAL DE RÉFLEXION ET D'ANALYSE:
Planète Terre: Mouvements Antisystémiques
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Alors que l'EZLN a fait sa réapparition très remarquée dans plus de 5 municipalités du Chiapas, à la date symbolique du 21 décembre 2012, que ces derniers ont envoyé à la veille de 2013 un communiqué plein d'espoir et annonçant ses prochains pas, nombres d'intellectuels se sont rejoint dans la ville de San Cristobal de Las Casas dans les installations du CIDECI (Université de la terre, université autonome et alternative du Chiapas) pour le 3* Séminaire International de Réfléxion et d'analyse "Planète Terre: Mouvements Antisystémiques".
Vous trouverez ci dessous, les réflexions en Français autour de ce séminaire ainsi que de brefs résumés des journées et des interventions.
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Deux des intellectuels les plus importants du Mexique et d’Amérique Latine, Luis Villoro et Pablo Gonzalez Casanova, interviendront au troisième Séminaire International de Réflexion et d’analyse “Planète Terre: Mouvements Antisystémiques”, qui débutera le 30 décembre 2012 et prendra fin le 2 janvier 2013 dans la ville de San Cristobal de Las Casas, Chiapas.
Les séminaires de 2010 et 2011, également organisés par le CIDECI- Université de la Terre, n’ont pas seulement attiré l’attention de la société civile organisée du Mexique et du monde; mais aussi la participation d’exposants qui ont su générer de profondes et importantes analyses des dynamiques et de l’avenir des mouvements antisystémiques. Comme par exemple Boaventura de Sousa Santos, Fernanda Navarro -qui sera de nouveau présent, tout comme Mercedes Oliveira-, Salvador Campanur de la communauté de Cherán, Carlos Manso, Xóchitl Leyva, entre autres.
Cette troisième rencontre a pour antécédent la mobilisation publique la plus importante à ce jour de l’Armée Zapatiste de Libération National (EZLN), mobilisation réalisée il y a neuf jours à peine dans les municipalité d’Ocosingo, Las Margaritas, Altamirano, Palenque et San Cristobal de Las Casas. Ainsi que le communiqué de la Commandance Générale. Cette rencontre coïncidera avec le 19ème anniversaire du soulèvement armé zapatiste et est marquée par la récente libération, grâce à la mobilisation sociale, des derniers prisonniers politiques du 1 décembre 2012 (1DMX).
Des mouvements sociaux d’Amérique, d’Asie et d’Europe, des chercheurs, des féministes et activistes de différentes organisations seront présents lors de cette édition. Tout comme Javier Sicilia, précurseur du Mouvement pour la paix avec Justice et Dignité, qui fera sa réapparition après son retrait du mouvement; Felix Diaz, autorité respectée de la communauté qom en Argentine, qui a récemment souffert d’un attentat; les intellectuels François Houtart et Jérôme Baschet; Severino Sharupi, de la confédération de Nationalités Indigènes de l’Équateur; Gustavo Esteva et Silvia Ribeiro; des représentants du peuples Mapuche, ainsi que des intégrants de divers mouvements sociaux et indigènes.
Les mouvements sociaux du Mexique et du monde ont été très actifs durant l’année 2012, depuis le Mexique jusqu’en Espagne, en Bolivie et aux États-Unis, des étudiants aux travailleurs, des yaquis aux pays arabes et, bien sûr, avec l’appui de médias indépendants, tels que Koman Ilel et Radio Pozol au Chiapas.
Bref résumé du 1er jour 30 décembre 2012
3EME SEMINAIRE INTERNATIONAL DE REFLEXION ET D’ANALYSE: “… PLANETE TERRE ET MOUVEMENTS ANTISYSTEMIQUES…”
Ce qui fut le jour était en fait la nuit. La pleine lune du 30 décembre est apparue au moment où ont été publiés les communiqués de l’EZLN que l’on connaît tous maintenant et qui nous donnent un nouveau souffle d’espoir. Leur lecture au CIDECI est venue clore (ou au contraire ouvrir) avec intensité la réflexion menée tout au long de cette journée du 3eme séminaire à partir des interventions et de l’action quotidienne: la lutte des peuples pour leur dignité est plus vivante que jamais. Le silence n’est pas une absence, sinon un “autre” message, un signal qui rompt avec les cris, le matraquage publicitaire et le spectacle. Un signal qui en impose par son incroyable sérénité silencieuse, un processus qui est en marche depuis longtemps parce qu’il vise la profondeur et la durée.
ARGENTINE:
Mouvement Paysan Santiago del Estero,
"les capitalistes ont acheté le gouvernement, mais ils ne peuvent pas nous acheter"
Maria-Helena Revello & Mitra Coronel (MOCASE-VC/MNCI-Argentina) Maria-Helena Revello et Mitra Coronel ont présenté la lutte qu’elles mènent dans la région de Santiago del Estero, au centre-ouest d’Argentine, une province où l’idéologie du progrès a pénétré en 1980 avec la culture du coton. Maria-Helena a parlé la première. 8 ans après l’introduction du coton, il est devenu évident que le progrès était en fait synonyme de spoliation et la population s’est alors mise à réfléchir et à chercher dans ses lois et son histoire, des ressources pour résister. Le mouvement a commencé à partir d’une question simple : A-t-on le droit de lutter pour garder nos terres ? On a commencé avec peu de monde, mais la dynamique a pris, de sorte qu’en 1990 on était suffisamment nombreux pour créer le Mouvement paysan de Santiago del Estero, avec 5 centrales, équivalent de ce que les zapatistes nomment les “Caracoles”. L’une des premières victoires de l’organisation a été de faire tomber le Gouverneur qui a impulsé cette dynamique de spoliation et qui dirigeait d’ailleurs la province depuis 50 ans.
“Aujourd’hui, plus de 9000 familles paysannes luttent ensemble. Des compañeros ont été assassinés, d’autres sont en prison, mais on se mobilise pour les défendre et les faire sortir. On ne demande rien au gouvernement, on en fait que réclamer l’effectivité de nos droits”. Les compañer@s soulignent qu’il existe une spoliation sélective, qui se matérialise par des attaques politiques et paramilitaires contre les populations isolées. Des mères sont même jetées en prison du fait de lutte contre les expulsion. A Santiago del Estero, il y a au moins une chose qui est très claire pour les gens : « Les capitalistes ont achetés le gouvernement, mais nous, ils ne peuvent pas nous acheter. Nos terres, on les défend parce qu’elles sont rouges du sang de nos compañeros. Pour nous, chaque compañero qui tombe est comme une graine qui est plantée. » De son côté, Mirta précise qu’en 2005, ils se sont rendus compte que d’autres provinces faisaient face à des problématiques similaires, raison pour laquelle s’est créé le Mouvement National Paysan Indien. Pour lutter contre l’exode rural des jeunes qui vont chercher une vie qu’ils imaginent meilleure en ville, le mouvement a développé une expérience éducative et en 2007, une école d’agroécologie a vu le jour. Depuis cette date, entre 50 et 70 jeunes se forment et sortent avec un diplôme. C’est une sorte d’université paysanne. Une université qui n’est en rien traditionnelle, car basée sur l’expérience des jeunes producteurs de la région et sur une conscience politique de la nécessité de lutter contre les agrotoxiques et de garder/récupérer la terre. Le mouvement compte sur 4 transmetteurs radio, rendus nécessaires par les distances de plus de 100 km qui existent entre les diverses centrales. Pour finir, les compañeras nous ont invité à “globaliser les luttes pour globaliser l’espoir”.
Arturo Anguiano
Auparavant, Arturo Anguiano, qui se définit lui-même comme un “citoyen marginal”, a fait un exposé mordant et corrosif de l’actualité politique institutionnelle du pays et a planté le cadre des antagonismes politiques entre ceux d’en-haut et ceux-d’en bas. Un en-haut politique qui vit dans l’illusion de son reflet, de ses mensonges où il existe une liberté de vote, une alternance politique, de nouveaux riches… Et un en-bas politique qui subit l’appropriation privative, l’exploitation, l’exclusion, l’abandon… et qui vit la politique d’État comme un cauchemar et une persécution. Les actuelles politiques de la peur (guerre contre le narcotrafic) ont détruit le tissu social et en même temps que la crise de l’État s’aggrave, on renoue avec les formes autoritaires de pouvoir. « On est les spectateurs du pouvoir. Quand on décide de vivre de manière autonome, on nous criminalise. Il n’y a pas d’alternatives possibles dans la voie électorale et les partis et ce constat nous amène à nous détourner de l’État. » Les résistances quotidiennes en sont jamais totalement contenues et la révolte au jour le jour continue. Il faut faire en sorte que celles-ci prennent de la force, s’étendent et pour ça il faut leur donner de la visibilité et les articuler. Face au recyclage des vices du pouvoir, il y a l’EZLN de l’autre côté du spectre, qui récupère des formes ancestrales d’autogouvernement et d’organisation. “La lutte d’aujourd’hui est celle de l’utopie égalitaire et démocratique”.
Félix Diaz
Communauté Qom,
La séssion vespertina à débuté avec Félix Diaz, originaire de la communauté Qom de la province de Formosa, au nord-est d’Argentine et qui a présenté son expérience de lutte. “Je suis ici pour la confiance que ma communauté m’a donné”. Il nous a apprit que l’état a créé une loi qui légifère la propriété des terres, pour toujours et quand la communauté s’organisera comme association civile, qui doit accomplir avec les protocoles bureaucratique de fait, comme le paiement de taxes et de logiques, qui n’ont rien à voir avec la dynamique interne d’une communauté. Une clause de cette loi disait que si l’association civile n’avait pas de registre d’activité depuis vingt ans, le territoire devenait propriété de l’Etat. Plusieurs années durant, cette dynamique perverse a permit à l’Etat des expropriations jusqu’à ce que la communauté ait dit “assez!”, comme en 2010 lorsqu’ils provoquèrent des barrages routiers.
Félix nous expose sa vie de persécution, la sienne et celle de sa famille. La manière avec laquelle le gouvernement à contracté des tueurs à gages pour l’assassiner mais que la solidarité est toujours présente. Il nous a aussi commenté le cas d’autres compañeros, morts pour défendre leurs territoire, comme le compañero Roberto Lopez assassiné par des francs-tireurs durant une action dans sa communauté, fait qui a provoqué de nombreuses mobilisations. Félix et son épouse qui a, avec son fils, subit des attaques physiques par le gouvernement, ils ont su continuer la lutte pour la justice à l’intérieur de la communauté.
Comme nous le commente Félix, le paradoxe est qu’en Argentine il existe une loi appelée 26.160, qui reconnait le droit des peuples indigènes à récupérer les terres des communautés qui ont été exproprié par le mensonge et la violence. Cependant l’idée de la personnalisation juridique de la communauté comme association civile, jusqu’aujourd’hui, s’inscrit comme une dynamique perverse qui permet à l’état de faire croire en une chose et en exécuter une autre.
Félix nous informe que la province de Formosa subit le même gouverneur depuis 1983 et que lui et sa communauté savent que le gouvernement ne résoudra pas les terres expropriés, malgré ça il n’oublierons pas que ces terres sont les leurs. Ils ne l’oublie pas car leurs vies, leurs esprits et leur culture dépend de ce territoire pour être, pour exister. “Notre lutte est pour ceux qui ont un coeur de chair, non pas d’argent et de pierre”.
Séssion matutina
Jérôme Baschet
France
Jérôme a partagé une réflexion sur l’insustentabilité du capitalisme. Le débat ouvert à l’assemblée s’est orienté vers la vie quotidienne comme l’espace temps dans lesquels se produisent et se reproduisent cette réalité systémique. Faire revivre le sentiment de la proportion, habiliter la centralité de la fraternité, l’amitié et toutes ces formes non capitalistes qui depuis toujours nous met en relation, comme possibilité de continuer à construire ici et maintenant un autre monde possible. Avec une ambiance clairement du type d’Ivan Illich, les pensés de Jérôme nous rapellent que les questions super-structurelles ne dépendent que de nous, de ce que nous faisons au quotidien comme société. Des brèches les résistances et les luttes sont ces brèches que nous devons motiver pour sauver la Madre Tierra (Mère Terre) et l’humanité, récupérer notre horizontalité comme possibilité de construction d’un autre type de relations sociales.
Xochitl Leyva
Chiapas
Xochitl s’est demandé comment la politique de la “multiculturalité” a été capable de changer un évènement aussi transcendant pour les communautés mayas, comme l’aboutissement d’un cycle temporel, en une marchandise, dans un discours profondément politique et social. Elle nous a permit de voir comment des créations théoriques sont capables de fétichiser des processus historiques et comment, l’état contemporain, se lie à ce fétichisme comme un promoteur de plans touristiques et rien de plus. Cela génère une forme de rideau qui couvre les processus vivants de lutte, de signification, de cosmovision et que ces dynamiques ne sont pas sans rapports. Elle fait partie d’une politique d’invisibilité de la lutte, de la banalisation de l’histoire. Xochitl nous propose de ne pas seulement nous connaitre, sinon de nous cosmo-connaitre. Dans un dialogue ouvert avec l’assistance, Xochitl a insisté sur la nécessité de doter notre vision de la réalité d’un esprit critique, d’une précision analytique qui nous permettent d’aller au-delà de la démagogie et la simple position planflétaire, et nous permette d’avancer à la transformation de la réalité, là où nous nous sommes arrêté, là où notre vie quotidienne se développe.
Mercedes Olivera
Mercedes nous a présenté un spectre intense d’actions collectives qui, vue avec la perspective des communiqués du commandemant zapatiste lue la nuit passé, nous explique que le silence est une action continue pour celui qui lutte, non pas une immobilité. Elle a insisté sur des questions de propriété de la terre non pas depuis la logique capitaliste, étatique, masculine, sinon qu’il est important de repenser la relation avec la terre. Pour commencer, depuis la perspective féminine, la femme comme propriétaire direct de la terre face au logique de monopole masculine qui laise la femme du migrant, de l’endetté, dans une position de déposséssion absolue et de dépendence totale au volonté de l’homme. La problématique n’est pas simple, incluant le litige de primogéniture contre la mère pour la possession de la terre qui rend évident que la figure masculine monopolise la représentativité valide face au pouvoir dans beaucoup d’endroit, par rapport à la propriété. Dans un débat avec l’assistance du séminaire, il a été question de l’idée même de propriété “il ne s’agit pas que l’homme ou la femme soit propriétaire, le problème est la propriété privée”. Ce point est clairement important, mais d’une forme abstraite et générale. Cependant, dans un sens concret et particulier, ici et maintenant, nous avons un problème de discrimination, de ségrégation de la femme face à la propriété, a conclut Mercedes.
La 2eme journée du Séminaire International de Réflexion et d’Analyse “…Planète Terre et mouvements antisystémiques…” a débuté dans une ambiance d’excitation et de joie parmi l’assistance. Le communiqué et les lettres publiées par le CCRI-EZLN qui ont été lues publiquement la veille au soir ont confirmé tout l’intéret de ces rencontres et des analyses engagées qui y ont été faites.
Les compañeros Emory Douglas, ex- Black Panther étasunien et Juan, du Movimiento por Justicia del Barrio de New York, ont présenté leurs luttes dans les quartiers marginalisés des États-Unis. Leurs expériences ont été mises en contrepoint de l’analyse théorique du belge François Houtart, fondateur du Centre Tricontinental (CETRI)
Ce dernier a exposé à grand renfort de données et de cartes les multiples facettes de la crise actuelle du capitalisme et a mis en avant quelques pistes pour la construction d’alternatives. Selon Houtart, la crise du capitalisme est multiple et se retrouve dans les domaines tant financier, qu’alimentaire ou encore climatiques et militaires. La crise financière qui a débuté en 2008 est due aux spéculateurs qui cherchent des profits immédiats déconnectés de l’économie réelle, c’est-à-dire productive. Alors que l’économie productive mondiale diminue depuis les années 1970, l’économie financière augmente de manière exponentielle depuis 2000. Ces spéculations sont l’une des causes de la crise alimentaire globale. Le prix des denrées alimentaires ont augmenté ces dernières années, non pas du fait de la pénurie mais davantage pour des questions liées à l’organisation du marché mondial. La crise alimentaire s’accélère compte tenu de la multiplication des cultures dédiées aux agrocarburants. Cette dernière vise à satisfaire 20% des besoins énergétiques démesurés des pays du Nord. Pour ce faire, plus de 60 millions de paysans seront spoliés et expulsés de leurs terres (pour plus d’informations: http://rebelion.org/noticia.php?id=91244). Si l’on persiste sur cette voie – celle du gâchis des énergies renouvelables – la crise climatique va empirer.
Suite à ce diagnostic de la crise du système actuel, Houtart propose 4 idées-clé pour construire des paradigmes alternatifs:
1. Transformer la relation entre notre société et la nature ainsi que passer de son exploitation au respect;
2. Reconstruire une économie sociale en lien avec les réelles besoins de la société;
3. Généraliser une vrais démocratie à partir de l’organisation de la vie collective;
4. Modifier la réalité en valorisant l’interculturalité et en l’orientant vers une perspective étique et politique qui se construit à partir de la diversité.
Le Movimiento por Justicia del Barrio de New York est une organisation de migrants mexicain, adhérent à la Otra Campaña et qui lutte contre les délogements dans l’Est d’Harlem, son quartier. Son expérience s’inscrit à partir de la promotion du mode de lutte zapatiste dans un processus urbain. Sa lutte se définie aussi à travers de l’émancipation des lesbiennes, des migrants, des femmes, de la multiculturalité et de tous les genres marginalisés. (Plus d’information sur: http://bit.ly/UF1ezf).
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